Le gouvernement était jeudi en "état d'alerte maximum", multipliant les réunions et contacts avec ses représentants à Bruxelles et dans les capitales des Quinze, à quelques heures du début du sommet. Pressé par une opposition anti-européenne très active sur le terrain, le Premier ministre social-démocrate Leszek Miller est lancé depuis plusieurs semaines dans une bataille sur les deux fronts. Depuis mercredi, des conférences de presse à la chaîne sont organisées à Varsovie pour informer de l'état des négociations. Un "studio" fonctionne depuis jeudi matin au ministère des Affaires étrangères pour relater en direct leur évolution et suivre jusqu'à vendredi en principe le sommet dans la capitale danoise. Mercredi soir, le porte-parole du gouvernement Michal Tober a fait état de propositions "avantageuses" de l'Union européenne, mais pas encore satisfaisantes. L'UE a accepté que l'aide aux agriculteurs des dix candidats pour la période 2004-2006 équivaut en moyenne à 50% du montant de celle directe accordée aux agriculteurs des Quinze. Elle s'élèverait à 45% en 2004, à 50% en 2005 et à 55% en 2006, selon la presse polonaise. Cette aide, composée de montants directs versés par l'UE, d'une réaffectation d'aides structurelles et d'un budget alloué par les gouvernements nationaux, n'avait jamais été évoquée à un taux aussi élevé de 50% depuis le début des négociations. En toute dernière limite, la présidence danoise de l'UE avait fait des propositions allant jusqu'à 40% en y mêlant les autres fonds, il y a quelques semaines. C'est déjà bien loin de la position de départ de la Commission européenne qui offrait 25% d'aide directe aux agriculteurs des Dix la première année, pour la porter à 100% sur dix ans. Mais les candidats ont réclamé pour leurs agriculteurs des avantages identiques à celle des Quinze dès 2004, afin de soutenir leurs compétitivité par rapport aux fermiers de l'ouest. Une deuxième proposition de la Commission européenne répond au souci d'une concurrence plus équitable entre fermiers des 25. "La clause générale de protection de certains produits pourra être élargie au marché agricole", a précisé M. Tober. Les Polonais, qui ont multiplié leurs rencontres avec les candidats, ont pris la tête de la bataille, forts de leur 38,4 millions, dont près de 15 millions installés à la campagne et 5,5 millions ne vivant que de l'agriculture issue de 1,9 million de fermes. Même si certains candidats tels la Slovaquie, l'Estonie et Chypre ont déjà conclu leurs négociations avec l'UE, ils profiteront des ajustements qui s'appliqueront à tout le monde, c'est-à-dire aussi à la Lettonie, Lituanie, République Tchèque, Slovénie, Hongrie et Malte. Le bât blesse surtout dans le volet agricole, l'un des chapitres laissés par la Commission européenne pour la fin parce que des plus sensibles. Vendredi matin, une session extraordinaire de négociations se tiendra à Copenhague avec une importante délégation polonaise, dont M. Miller, ses trois vice-Premiers ministres et en particulier celui chargé de l'Agriculture, Jaroslaw Kalinowski, lui-même fermier et président du parti paysan PSL. Varsovie a aussi d'autres exigences: une compensation à son apport au budget communautaire entre 2004 et 2006 pour éviter d'être contributeur net de l'UE, que cette dernière veut limiter à 2004, une augmentation des quotas de production de lait et de blé, et une baisse de la TVA sur les machines agricoles. |