Trop peu de pluies - même si d'importantes précipitations ont enfin touché la région mercredi matin -, des chaleurs trop fortes: le constat est le même des Pyrénées aux plaines de la Gironde. "C'est comme dans la fable sur la peste : tout le monde n'en mourra pas mais tout le monde est touché", résume, fataliste, un responsable de la chambre d'Agriculture des Landes. Sans provoquer d'hécatombes, les températures caniculaires ont "stressé" les poulets qui grossissent peu, les canards gavés qui donnent des foies plus petits ou les vaches qui produisent moins de lait. Le maïs se dessèche, les salades montent trop vite, les pommes ne se colorent pas, les prunes restent petites, les pommes de terre brunissent. En Gironde, les 60.000 ha de prairies qui donnent de l'herbe-fourrage ressemblent à du "paillasson". Alors que le gouvernement a convoqué vendredi une conférence agricole pour faire le point sur la sécheresse, les premières estimations chiffrées sont catastrophiques dans tous les départements de la région. Dans le Lot-et-Garonne, qui tire la majeure partie de ses ressources de l'agriculture (21.000 emplois salariés), on prévoit d'ores et déjà de -50 à -100% pour les céréales non irriguées, -30 à -40% pour le maïs irrigué, -20% pour le tournesol et le sorgho. Et si les prix des fruits et légumes ont flambé, les agriculteurs n'ont pas tiré profit d'un marché "en dent de scie". En juillet, le kilo de tomates se vendait 2,15 euros dans les supermarchés d'Agen, alors que les producteurs du Lot-et-Garonne arrivaient péniblement à écouler leurs légumes à 0,30 euros le kilo. A vec les températures record, même le vignoble a souffert dans le sud de l'Aquitaine : les vignes ont brûlé, les feuilles tombent et les raisins se dessèchent dans plusieurs terroirs, l'Armagnac (Landes et Gers), l'Irouleguy, au pays basque, ou le Tursan (Landes) qui s'attend à 40% de perte. Le vignoble bordelais a quant à lui pâti de violents orages: le 24 juin, une mini-tornade de grêle a hâché plus de 6.000 hectares dans l'Entre-Deux-Mers. Le 15 juillet, des orages meurtriers ont détruit plus de 5.000 ha plus au nord. En attendant les vendanges, les plus précoces depuis un siècle, chacun retient sa respiration, en espérant échapper à des intempéries de dernière minute. Dans tous les autres secteurs, les conséquences des excès climatiques risquent d'être d'autant plus graves que les agriculteurs du sud-ouest étaient déjà fragilisés par la crise de la vache folle et la tempête de 1999. Dans les Landes, qui comptent 8.900 exploitations centrées sur le maïs, la volaille et le boeuf, les revenus agricoles pourraient diminuer d'un quart dans les prochains mois. "Après une succession de calamités, les trésoreries sont exsangues et l'année 2003 va enfoncer les bilans, certaines exploitations n'y survivront pas", s'inquiète-t-on à la chambre d'agriculture du Lot-et-Garonne, où le tiers des agriculteurs ont disparu au cours de la dernière décennie. L'enjeu, désormais, est de convaincre les pouvoirs publics de prendre les mesures nécessaires pour "sauver ce qui peut l'être", avec l'espoir d'obtenir, outre les aides ponctuelles, des mesures à plus long terme pour éviter l'asphyxie. |