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Social Coup de semonce à Bricout-Delbeck, révélateur des tensions en Champagne

La "saisie" des stocks de champagne opérée mercredi 5 novembre 2003 par les salariés de Bricout-Delbeck (ex-financière Martin), en cours de liquidation, révèle de fortes tensions financières et commerciales dans la Champagne viticole, selon les experts régionaux.

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Les appels devant la justice de l'ancien propriétaire et d'un repreneur, écarté, ont paralysé l'activité de l'ancien groupe et le reclassement du personnel. Celui-ci menace désormais de "verser au caniveau" six millions de bouteilles et 6.000 hl (800.000 bouteilles) de vins clairs (non champanisés), si "pris en otage par le négoce et la justice, il n'arrive pas à retravailler".
La faillite de la financière Martin au printemps dernier, sanctionnée par une liquidation prononcée le 19 août par le tribunal de commerce de Reims, a montré les difficultés d'une partie du monde viticole.
La financière Martin s'était spécialisée dans les ventes spéculatives de champagne, fournissant à la demande des vins sans marque pour des étiquettes "de complaisance", vouées à jouer les produits d'appel dans la grande distribution, explique Noël Sainzelle, délégué CGT de Bricout.
Mais de fortes tensions existent désormais sur le marché du raisin, frappé de raréfaction structurelle (l'appellation a atteint sa limite supérieure de production), et conjoncturelle, après une vendange réduite par les gelées d'avril dernier. Mercredi, des réunions discrètes se déroulaient dans les instances du champagne pour tenter de faire retomber la fièvre.
Le "ciseau" commercial et financier s'exerce sur les maisons qui payent cher (4,25 euros le kilo) la matière première, mais consentent des ristournes à la grande distribution de plus en plus exigeante, pour renflouer les caisses et se maintenir dans l'activité. "La faillite de la financière Martin était l'illustration de ce mouvement, amplifié par une gestion maladroite et l'émission de 300 millions d'euros de fausses factures, une affaire sur laquelle la justice enquête", explique Bernard Beaulieu, secrétaire général de l'intersyndicat CGT du champagne. C'est lui qui a laborieusement négocié l'été dernier avec une partie du négoce champenois la reprise "en bon ordre" des 136 salariés de Bricout-Delbeck. Le 19 août, le tribunal de commerce avait choisi cette solution privilégiant un important volet social.
Vranken-Pommery reprenait la plus grande part des actifs (marques, équipements, stocks et approvisionnements), mais reclassait au moins 86 salariés dont 62 commerciaux, Moët-et-Chandon devait reprendre une part des approvisionnements et sept salariés. Le reste du négoce devait reclasser 36 salariés restants, au prorata des approvisionnements repris.
Les appels formés par Pierre Martin et la financière Opson (filiale du groupe américain Schneider), ont remis l'accord en cause. "Il faut que le 13 novembre, la cour d'appel tranche dans le sens du tribunal de commerce", explique Bernard Beaulieu. "Le montage industriel imaginé par Vranken-Pommery ne peut fonctionner que s'il peut disposer des stocks, des approvisionnements et des locaux", résume Noël Sainzelle.
"Et nous, nous ne voulons que travailler. Nous sommes les otages de la justice et d'une partie du négoce à la recherche du désordre pour s'approprier des approvisionnements. Des preneurs d'otages, ce sont des terroristes. Pour nous défendre, s'il le faut, nous détruirons les stocks", martèle-t-il.


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