Jeudi matin, quelques employés se sont pressés devant les grilles de leur usine, après l'annonce du démontage de leur outil de production et de l'interpellation du directeur de leur usine, appartenant au groupe italien Unichips. "C'était la première fois qu'on laissait l'usine entièrement vide, sous prétexte d'un congé forcé au titre de la RTT. Hier, en faisant un tour, je me suis rendu compte que des camions sortaient de l'usine. J'ai alerté l'inspection du travail", a expliqué à l'AFP Angelo Ondicana, secrétaire au comité d'entreprise. Des délégués des salariés de l'usine (200 employés) ont constaté mercredi après-midi le démontage de deux chaînes de production sur quatre et l'enlèvement des machines, embarquées dans des poids lourds venus d'Italie. Empêchés physiquement de pénétrer sur le site, les syndicalistes ont dénoncé un démontage sauvage et illégal et ont déposé plainte jeudi. De son côté, le directeur de l'usine italien, Vilmo Maderi, a été placé en garde à vue dès mercredi soir pour infraction à la législation du code du travail, pour avoir refusé l'accès de l'usine aux représentants au CE. Selon des témoins, au moins cinq camions ont quitté l'usine depuis le début de la semaine et 18 auraient été prévus au total pour "déménager toute l'usine", de source syndicale. Il ne resterait que deux petites chaînes de production dans l'usine, ne permettant d'employer que 58 personnes. "C'est un travail de sauvage. La chaîne de production 4, la plus importante, et la chaîne de conditionnement 3 ont été démontées. Les tuyaux d'alimentation en vapeur ont été découpés au chalumeau", a décrit M. Ondicana, après une visite dans l'usine. Indigné mais peu surpris, le responsable syndical affirme avoir pressenti la menace et évoque une similitude avec le cas de Palace Parfums, l'usine de Saint-Nicolas d'Aliermont (Seine-maritime) que les ouvrières avaient retrouvée totalement vidée au retour des vacances d'hiver 2002. Son patron avait fait sa réapparition, deux jours plus tard, au tribunal de commerce de Neufchâtel-en-Bray, où il était venu se déclarer en cessation de paiement. "C'est exactement la même chose qui nous arrive. On se doutait que c'était louche ce congé forcé, mais on n'avait pas de preuve, alors on s'est méfié et on a surveillé le site", a expliqué M. Ondicana. "Quand je suis entré dans l'usine et que j'ai vu ce sabotage, j'avais les larmes aux yeux", a-t-il poursuivi. Le maire UMP de Péronne, Jean-Pierre Viennot, a dénoncé de son côté des "méthodes de voyou" : "une entreprise est fermée pour RTT. On fait venir des employés italiens pour démonter les chaînes (..). C'est absolument inadmissible". L'usine Flodor de Péronne appartient depuis 1993 au groupe Unichips. Elle a déjà vu en décembre 2002 la suppression de 80 postes, lors d'un plan social décidé par la direction italienne du groupe. Depuis mercredi soir, les salariés se relaient pour maintenir une surveillance du site. "On va se battre pour le maintien de l'activité mais en l'état, il est impossible de reprendre (le travail)", a estimé M. Ondicana, ajoutant qu'il y avait un risque que "tout cela finisse en dépôt de bilan". La Fédération nationale agroalimentaire et forestière (FNAF) de la CGT a de son côté dénoncé "l'attitude scandaleuse de la direction italienne" et appelé "l'ensemble des syndicats de Picardie à soutenir les salariés" de Flodor. |