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Primeurs 2002 Prix en chute dans un contexte de crise

BORDEAUX, 8 mai (AFP) - Mouton-Rothschild: -30%, Palmer: -32%, La Conseillante: -38% ... A Bordeaux, les prix des primeurs 2002 sont en chute dans un contexte mondial de crise économique.

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"Il s'agit d'un réajustement: ceux qui baissent avaient augmenté dans les mêmes proportions ces dernières années", affirme Jean-Louis Trocard, le président du Comité interprofessionnel des vins de Bordeaux (CIVB), qui regroupe propriétaires et négociants.

Parmi les baisses les plus spectaculaires, les prix primeurs de Brane-Cantenac, deuxième cru classé de Margaux, ont chuté de plus de 70% en deux ans, passant de 70 à 19 euros.

De l'avis général, les prix astronomiques atteints par les primeurs 2000 ne pouvaient pas tenir, avec la dévaluation du dollar par rapport à l'euro, les soubresauts de la bourse et, plus généralement, le contexte international. La pression accrue des banques sur les négociants bordelais et, pour les propriétaires, l'échéance des impôts sur les énormes plus-values réalisées les années précédentes ont accentué le mouvement.

Dans cette "ambiance morose", Cheval Blanc n'a pas encore fixé ses prix, préférant pour l'instant "observer la situation" avant toute décision, comme l'explique Pierre Lurton, le gérant du premier grand cru de Saint-Emilion.

Unique au monde, le système complexe des primeurs -qui concerne 5% de la production bordelaise en volume- veut que les grands châteaux fixent chaque année le prix de leur vin, en fonction de la qualité du millésime et de la demande du marché.

Après une flambée spéculative en 1997, les prix ont culminé en 2000, année millénaire et millésime exceptionnel. Après une campagne 2001 en demi-teinte malgré des prix en baisse, les 2002, de qualité très hétérogène, peinent à trouver des acheteurs.

"Les clients n'ont aucun intérêt à payer d'avance un produit qui serait disponible au même prix deux ans plus tard", explique Jean-Luc Thunevin, négociant à Saint-Emilion. La décote des 1997, qui s'étaient arrachés à prix d'or en primeur, a aussi contribué à calmer les spéculateurs.

Les ventes en primeurs, qui permettent aux grands crus de vendre 80% de leur production deux ans avant la mise en bouteille, reposent sur deux postulats spéculatifs: le risque de pénurie et la progression des prix au moment de la sortie des bouteilles.

"On est sorti des années de frime où l'argent ruisselait à flot et où les produits de luxe s'envolaient. Ceux qui achètent du vin maintenant veulent des garanties sur les produits et un bon rapport qualité-prix", souligne Patrick Bernard, patron de la société Millésima.

En outre, hors de la zone euro, "les clients ne se précipitent pas, ils voudraient payer les 2002 moins cher que les 2001 dans leur devise", une gageure avec un dollar en baisse de 30% face à l'euro, selon Francis Cruse, directeur de l'Union des Maisons de Bordeaux.

Aussi, malgré les prix en chute et des volumes moindres qu'en 2001 à cause des caprices de la météo, tous les vins ne se vendent pas.

"Ce qui marche, ce sont les vins connus, les grandes marques traditionnelles: on revient vers un certain classicisme", explique le comte Stephan von Neipperg, heureux propriétaire de Canon-Lagaffelière et de La Mondotte.

"On sort des prix spéculatifs, le vin retrouve un prix auquel on peut le boire", résume un négociant pour lequel "c'est le moment où jamais, pour les amateurs, de faire des affaires". Mais comme le résume crûment un autre, "pour les pauvres, cela ne change rien, car on reste sur un marché de luxe", avec des premiers crus à 80 euros.


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