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Energie verte Le délicat virage français des biocarburants d'ici 2010

Flambée du brut, dépendance énergétique, effet de serre : face aux incertitudes suscitées par le pétrole, une partie de la filière française s'attache a négocier le virage des biocarburants, avec en point de mire une intégration croissante de ces "essences vertes" dans les carburants conventionnels.

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Une directive européenne de 2003 fixe comme objectif un taux d'intégration énergétique de carburants végétaux de 5,75 % dans les essences et gazoles en 2010.

Un but qui ne sera pas atteint, selon l'Institut Français du Pétrole (IFP), en pointe de la recherche sur les biocarburants. "En 2010, nous serons à peu près à la moitié des objectifs", selon Daniel Ballerini, expert en biotechnologie de l'IFP.

Même si le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a annoncé le 7 septembre un plan visant à tripler la production de biocarburants d'ici à 2007 pour faire passer la production à 1,25 million de tonnes, le compte n'y sera pas dans six ans.

"Les principaux problèmes auxquels sont confrontés les biocarburants concernent les coûts et la disponibilité", explique Olivier Appert, président de l'IFP.

Mais le combat doit être mené, selon eux, notamment pour relever les défis de la filière énergétique mondiale : la croissance inéluctable de la demande, le changement climatique et le caractère fini des ressources fossiles (pétrole, gaz, charbon).

"Au niveau mondial, les biocarburants restent marginaux, l'éthanol représente 19 millions de tonnes, l'ester méthylique d'huile végétale (EMHV, ou biodiesel), seulement 1,6 million de tonnes, pour une consommation mondiale de pétrole dans les transports de 1,7 milliard de tonnes", insiste Olivier Appert.

Cet accroissement attendu de la part des biocarburants est "une très bonne orientation car cela permet de diversifier" les sources d'approvisionnement, même si cela ne remplacera pas le pétrole, selon Jean-Marie Chevalier, professeur à l'université Paris-Dauphine et auteur des "grandes batailles de l'énergie" (Gallimard, Folio Actuel).

Mais les biocarburants coûtent chers. Les prix calculés en gigajoule sont encore loin de ceux de l'essence. En Europe, l'éthanol coûte entre 24,7 et 37,8 dollars/gigajoule, alors que l'essence, calculée sur la base d'un baril de brut à 50 dollars, coûte 12 dollars/GJ, selon des chiffres de l'AIE (Agence internationale de l'énergie) et de l'IFP.

Le Brésil, à l'avant-garde pour les biocarburants, parvient à produire un éthanol à 11 USD/GJ, donc compétitif lorsque le baril est au plus haut.

Outre le coût, les biocarburants se heurtent aussi à un problème de disponibilité. Ils sont en compétition avec le marché alimentaire (betteraves, blé, oléagineux).

Actuellement, l'équivalent de 26 000 hectares (betterave plus blé) sont consacrés à la production d'éthanol en France (96 000 tonnes). Il faudrait faire passer cette superficie à plus de 300 000 ha en 2010 pour atteindre l'objectif des 5,75 % (1 million de tonnes). L'écart est encore plus flagrant pour le biodiesel puisqu'il faudrait passer de 280 000 ha (oléagineux) à 1,9 million d'ha pour produire 2,4 millions de tonnes.

"Nous n'avons absolument aucun problème pour fournir la surface à cultiver", estime le directeur général de la Confédération générales des planteurs de betteraves Alain Jeanroy. Mais la Filière des huiles et protéines végétales est moins optimiste en estimant que la France ne pourra fournir que 1 million de tonnes de biodiesel en 2010, avec 600 à 700 000 hectares dédiés.


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