A la veille du 41ème Salon international de l'agriculture, à Paris, le chef de l'Etat a fixé les grandes orientations du monde agricole pour les années à venir, dans la perspective de nouvelles réformes après 2013 de la politique agricole commune (PAC) de l'Union européenne élargie. "Il faut poursuivre l'objectif d'une agriculture économiquement forte et écologiquement responsable", a-t-il déclaré dans une interview à l'hebdomadaire La France agricole.
"Notre agriculture va vivre des changements importants. C'est inévitable. (...) D'ici à 2013, ce serait dangereux et même une faute de se croiser les bras. Nous avons près de dix années devant nous. Il faut en profiter pour mieux préparer l'avenir", a-t-il dit. Mais à trois semaines du premier tour des élections régionales, Jacques Chirac cherche aussi à rassurer un monde paysan inquiet, en assurant que les quelque 900.000 agriculteurs français doivent pouvoir "vivre du revenu de leur activité". "C'est un principe sur lequel on ne peut transiger", affirme-t-il.
Il a toutefois reconnu que les aides, qui atteignent parfois la moitié du revenu des paysans, ne pourront plus augmenter. "On atteint là un cap que l'on ne peut pas dépasser", a-t-il dit alors que l'UE a commencé à couper le lien entre les aides directes versées aux agriculteurs et le niveau de leur production, une mesure à laquelle Paris s'était longtemps opposée.
La France est la première bénéficiaire de la PAC qui est, avec 44 milliards d'euros, le premier budget communautaire. Le chef de l'Etat encourage les paysans à mieux répondre aux attentes des Français, soulignant qu'"il faut garantir la sécurité alimentaire pour tous" et que "l'accès aux produits de qualité doit être notre première priorité". Mais, dit-il, "la sécurité a un coût. Elle ne peut s'accommoder de la baisse continue des prix agricoles".
Jacques Chirac plaide pour "une agriculture écologiquement responsable", affirmant qu'"il faut aller plus loin" dans cette voie, en concertation avec les producteurs. Il rejette toutefois l'idée d'une taxe sur l'eau pour les paysans pollueurs, estimant que cette mesure réclamée avec insistance par les écologistes "doit être l'ultime solution, s'il n'y en a pas d'autres".
Sur les OGM, il appelle à être "très vigilants" mais affirme que les recherches doivent se poursuivre "avec toutes les garanties" et "en toute transparence". Par ailleurs, le président Chirac défend avec fermeté "la capacité exportatrice" de la France, première puissance agricole européenne et qui a affiché un excédent à l'exportation de 9 milliards d'euros en 2003.
Mais face à l'assaut conjugué de grands pays exportateurs, comme le Brésil et l'Australie, et des pays du sud contre les subventions européennes, il réitère sa proposition de supprimer progressivement les subventions à l'exportation "réellement déstabilisatrices" pour les pays les plus pauvres, tels que le Mali. Le désaccord sur les subventions à l'agriculture a été l'une des principales raisons de l'échec des négociations de l'OMC à Cancun, en septembre 2003. |