Elevage Dans le Larzac, "cette année la sécheresse a commencé au printemps"
Chèvres et brebis ont déserté le plateau du Larzac où la sécheresse, exceptionnelle par sa précocité selon les éleveurs, a brûlé les prairies nourrissant habituellement les animaux jusqu'à la fin de l'automne.
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"Il n'y a plus d'herbe, et toutes mes bêtes sont à la bergerie", déplore Jean-Noël Malan, propriétaire de 350 brebis à viande à Olmet-et-Villecun (Hérault), soulignant qu'en 22 ans, c'est "la première fois qu'elles sont dedans à cette époque de l'année". "Je les nourris avec du foin, et j'entame déjà les provisions de l'hiver alors que la récolte a été moitié moins importante que d'habitude", ajoute-t-il.
"Il va falloir que j'achète du fourrage, mais comme la sécheresse est générale, et touche aussi l'Espagne et le Portugal qui commencent à s'approvisionner en France, les prix grimpent en flèche", s'inquiète l'éleveur. "Le foin ordinaire est passé de 9 à 22 centimes d'euros le kilo".
Pour limiter les frais, il va devoir vendre 15% de son troupeau en réformant les brebis dès sept ans au lieu de huit normalement. Christophe Compan, éleveur dans le village voisin de Saint-Felix-de-l'Héras depuis 1987, a déjà vendu 120 de ses 450 brebis laitières au début de l'été, alors que les cours étaient au plus bas. "Nous sommes tous sous perfusion au Crédit Agricole, et cette troisième année de sécheresse consécutive est très difficile", souligne le secrétaire général du syndicat des éleveurs, affilié à la FDSEA.
"Nous sommes dans une région traditionnellement sèche l'été", rappelle-t-il. "Mais cette année, la sécheresse a commencé dès la fin de l'hiver, après deux années déjà très sèches". Lui aussi a rentré ses bêtes au début de la semaine, car elles ne trouvaient plus sur les parcours desséchés de quoi se nourrir. "Le manque de pluie commence à avoir des conséquences sur les prairies naturelles : les graminées ont été brûlées ou mangées avant d'avoir fait des graines, et il faudra plusieurs années pour que la végétation se reconstitue", estime Christophe.
"Les ronces, les genêts, les chardons et les buis prennent le dessus, avec leurs racines profondes, mais ils n'ont aucun valeur nutritive", regrette Jean-Noël. Si Jean-Noël dispose d'une source et Christophe donne à ses brebis de l'eau du robinet - AOC Roquefort oblige - nombreux sont les éleveurs du Larzac obligés d'aller chercher en tracteur l'eau pour abreuver leurs troupeaux.
"Les citernes où l'on récupère les eaux de pluies sont vides depuis plusieurs mois, et les lavognes, ces bassins argileux qui recueillent les eaux d'écoulement, sont asséchées", explique Jean-Noël. Plusieurs villages alentours ont été approvisionnés par camions citernes en juillet après le tarissement d'un des trois pompages d'eau potable du plateau, et des restrictions sévères perdurent.
Reste à espérer que les traditionnelles pluies de la mi-août, qui permettent aux prairies de nourrir les bêtes pendant l'automne, soient au rendez vous. "Si la pluie tombe, on est sauvés, sinon çà sera une catastrophe et je ne sais pas si on s'en relèvera", estime Jean-Noël, qui hésite ironiquement entre "apprendre la danse de la pluie ou faire des processions religieuses comme autrefois".
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