Superéthanol Des pompes orphelines en attente de voitures
A l'heure du grand rush matinal, les voitures défilent à la station service du quai d'Issy-les-Moulineaux, à Paris, mais l'unique pompe de superéthanol reste désespérément vide, illustration de la difficile mise en service de ce carburant vert encore peu connu en France.
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"Nous servons en moyenne 70 clients par heure mais, pour le superéthanol, il n'y a qu'un seul véhicule flex-fuel par jour qui vient faire le plein", explique une employée de cette station Total, l'une des premières à distribuer le biocarburant E85 dans la capitale. Les véhicules flex-fuel sont aujourd'hui les seuls capables d'utiliser aussi bien l'E85 ou l'essence sans plomb 95 et 98. Seuls quelques constructeurs (Saab, Volvo et Ford) commercialisent aujourd'hui ces véhicules dans l'Hexagone. "Il n'y a que 1.200 véhicules en France qui roulent au flex-fuel", rappelle l'employée, qui préfère taire son nom. "Et tout le monde ne roule pas en Volvo ou en Saab!".
Dans cette station, l'E85, carburant composé au maximum de 85% d'éthanol et de 15% d'essence, est proposé à un prix inférieur de 50 centimes par litre comparé à l'essence sans plomb 95. Mais cette différence de prix ne suffit pas encore à attirer les clients. Le gouvernement avait annoncé en novembre, lors de la signature de la charte flex-fuel, que plus de 500 pompes "vertes" seront disponibles en France en 2007, un chiffre qui doit tripler en 2008. Au total, 25 pompes à superéthanol sont actuellement réparties en France. L'E85 reste encore "marginal" comparé à l'ensemble des ventes de carburant des centres Leclerc, estime Thierry Forien, le directeur de Siplec, la filiale de négoce international de Leclerc. "Mais c'était la même chose lors de l'introduction du sans plomb 95. Il faut surmonter une certaine inertie au début", estime-t-il.
Depuis 2000, la production de biocarburants (biodiesels et éthanols) plafonne à 600.000 m3 par an, soit environ 1% de la consommation nationale de carburants, selon l'Union française des industries pétrolières. Face à l'émergence des pompes vertes, les véhicules adaptés font encore défaut. Pour l'heure, seuls quelques loueurs d'automobiles proposent des véhicules roulant au superéthanol. Mais l'accueil est mitigé. "Les clients ne connaissent pas encore ce produit et ne pensent pas à nous demander si nous avons des voitures flex-fuel", explique, sous couvert d'anonymat, un responsable commercial d'Europcar à Paris.
L'achat d'un véhicule flex-fuel reste encore un acte motivé par le respect de l'environnement, l'E85 permettant de réduire les rejets de CO2, principal gaz à effet de serre. "Mes clients sont des écologistes convaincus", précise ainsi Jean-Pierre Parmentier, concessionnaire Volvo dans le 11e arrondissement à Paris, qui a vendu deux voitures flex-fuel en 2006. "En Suède, 50% des véhicules immatriculés roulent au flex-fuel. En France, c'est la politique fiscale qui bloque les ventes", estime-t-il.
Bercy a pourtant fixé un objectif de prix à 80 centimes d'euro par litre et indiqué que la partie éthanol du carburant ne serait pas soumise à la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP). La situation devrait se débloquer dès cet été, avec l'offensive des constructeurs français Renault et PSA Peugeot Citroën qui ont annoncé la sortie de plusieurs modèles à moteur flex-fuel.
Le gouvernement table sur une part des biocarburants dans la consommation totale en France de 5,75% en 2008 et de 7% en 2010. Quant aux constructeurs, ils ont pris l'engagement qu'à l'horizon 2010 la moitié de leurs moteurs essence seront flex-fuel.
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