Haut-Rhin De l'insecticide contre la chrysomèle du maïs
Malgré les réserves des défenseurs de la nature, l'épandage d'insecticide a commencé lundi dans le Haut-Rhin pour tenter d'éradiquer un foyer de chrysomèles du maïs, probablement introduites par les long-courriers de l'aéroport Bâle-Mulhouse, tout proche.
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Des enjambeurs de plusieurs mètres de haut se frayaient lundi un passage au milieu des épis, tandis qu'atterrissaient et décollaient les avions, à l'autre bout du champ. Huit coléoptères ont été capturés cette année dans le sud du Haut-Rhin. Les autorités ont aussitôt ordonné des mesures radicales dans des périmètres de cinq à dix kilomètres. Aux Etats-Unis d'où elle est originaire, la larve de la chrysomèle provoque en effet des dégâts évalués à près d'un milliard de dollars par an en grignotant les racines du maïs. La superficie à traiter est évaluée à quelque 1.500 hectares, a précisé lundi lors d'un point presse Sophie Winninger, chef du service régional de la protection des végétaux, qui dépend du ministère de l'Agriculture et de la pêche.
L'insecte avait été repéré pour la première fois en Europe en 1992, près de l'aéroport international de Belgrade, en pleine guerre de Yougoslavie. Il s'est ensuite répandu dans les pays voisins, jusqu'en France où des spécimens ont été capturés près des aéroports parisiens de Roissy et Orly en 2002 et en 2004. Des spécimens avaient déjà été découverts en 2003 autour de l'aéroport de Bâle-Mulhouse. Pour rassurer les riverains, les autorités ont cette année renoncé à recourir à des hélicoptères pour épandre l'insecticide. Le produit choisi, à base de deltaméthrine, est couramment utilisé pour la culture de céréales et en arboriculture, ainsi que dans la vigne.
Le traitement a pour but "de tuer les insectes adultes et d'éviter leur dispersion après la récolte", précise Mme Winninger. Afin de "casser le cycle de reproduction", les parcelles concernées ne pourront accueillir du maïs l'an prochain. Un comité de suivi, auquel sont invités entre autres des représentants des services de l'Etat, des apiculteurs, de la Chambre d'agriculture et de l'association Alsace Nature, devrait se réunir prochainement, a ajouté Mme Winninger. L'association régionale de défense de l'environnement avait demandé vendredi à ce qu'une réflexion soit lancée pour trouver des solutions "durables", acceptables d'un point de vue écologique.
Alsace Nature dénonce notamment les conséquences néfastes de l'épandage d'insecticide sur les insectes pollinisateurs et juge "disproportionné" le recours massif à l'insecticide. Si le produit utilisé "n'est pas anodin, aucun lien direct de cause à effet n'a pu être établi entre son utilisation et la surmortalité des abeilles", rétorque Mme Winninger. Il n'empêche que la préfecture a quand même invité les apiculteurs à confiner leurs abeilles, relève Alsace Nature.
Un peu plus au nord et de l'autre côté du Rhin, autour de la ville allemande de Lahr où un foyer de chrysomèles a également été découvert cet été, les autorités ont aussi opté pour le recours à un insecticide. Un choix que condamne l'association écologiste allemande BUND, qui propose même une solution alternative: faucher prématurément les champs de maïs et produire du biogaz avec la récolte.
Selon Mme Winninger, cette solution présenterait néanmoins le risque d'encourager les chrysomèles, privées de maïs, "à s'envoler vers de nouvelles parcelles". Venu à Hésingue observer les manoeuvres, un agriculteur local reste sceptique. "Le problème, c'est que leur bestiole reviendra par les prochains avions", relève ce quinquagénaire qui préfère ne pas être cité nommément.
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