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Cyclone Dean La catastrophe de trop pour la banane antillaise

La destruction des plantations de bananiers aux Antilles par le cyclone Dean est un nouveau coup porté à un secteur sinistré, qui tente depuis des années de résister à la concurrence des bananes latino-américaines et à la fréquence des catastrophes naturelles.

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Après le passage de l'ouragan, la production de bananes, moteur de l'agriculture locale, a été détruite à 100% en Martinique et à 80% en Guadeloupe, selon les planteurs. Le coût de la remise sur pied des bananeraies des deux îles a été estimé à 115 millions d'euros par le secrétaire d'Etat à l'outre-mer Christian Estrosi, qui a visité dès samedi des plantations détruites.

Aux Antilles, la banane est la principale production agricole avec 300.000 tonnes par an, dont les trois-quarts en Martinique, soit environ 43% de la production européenne. Elle contribue fortement aux revenus locaux et à l'emploi, avec entre 15.000 et 18.000 personnes travaillant dans ce secteur sur une population de 850.000 habitants.

Mais, depuis de nombreuses années, les producteurs de bananes antillais font face à une véritable crise due notamment à une chute régulière des cours, aux aléas climatiques, mais surtout à la concurrence renforcée des "bananes-dollar" d'Amérique latine qui représentent les quatre-cinquièmes des importations européennes. En 1993, l'Union européenne avait instauré un système de quotas, accordant un traitement préférentiel aux bananes en provenance d'anciennes colonies européennes dans les Caraïbes et en Afrique. Mais, les pays latino-américains producteurs de bananes, ayant à payer des droits énormes sur les bananes qu'ils exportaient vers l'Europe, se sont alors plaints devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Les quotas ont été supprimés le 1er janvier 2006 après que l'UE, ayant perdu "la guerre de la banane" devant l'OMC, les eut remplacés par un tarif douanier unique de 176 euros la tonne. Le problème demeure toutefois. Les Etats-Unis ont en effet saisi l'OMC fin juin, estimant que le droit de douane imposé par l'UE aux bananes latino-américaines portait préjudice aux exportations des grands pays producteurs comme l'Equateur, le Honduras, le Panama et le Nicaragua.

Confrontée depuis 2002 à une crise de grande ampleur, la filière antillaise de la banane s'est engagée dans un processus de restructuration pour rétablir sa compétitivité sur le marché européen. Mais, des coûts salariaux élevés et des coûts de production supérieurs aux recettes perçues ont incité nombre d'exploitants, en butte à de gros problèmes de trésorerie, à cesser leur activité. En quatorze ans, le nombre de producteurs de bananes aux Antilles a chuté de plus de moitié, passant de 2.200 en 1993 à environ 850 actuellement. Et au cours des trois dernières années, quelque 2.500 emplois ont été perdus dans le secteur. Sur l'année 2006, en Guadeloupe, près de 23% de la surface consacrée à la banane a été abandonnée et 13,6% des producteurs ont cessé leur activité, selon l'Institut d'émission des départements d'Outre-Mer (IEDOM). La production dans ce département a ainsi dégringolé en 2006 à 48.000 tonnes (-45% entre 2000 et 2006).

Après le passage de Dean, les planteurs guadeloupéens estiment qu'ils termineront l'année avec un volume de production de 30.000 tonnes au lieu des 52.000 prévues. Et le risque maintenant, c'est que pendant les sept mois pendant lesquels la banane antillaise sera absente des étalages européens, la banane latino-américaine s'installe durablement. Le Premier ministre François Fillon s'est rendu en Martinique et en Guadeloupe afin d'évaluer les dégâts.

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