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Ogm Des patates aux céréales, l'allemand Basf trace son sillon

Patates transgéniques en Europe, soja au Brésil: le géant allemand de la chimie Basf tente de poser des jalons dans les Ogm, entre méfiance en Europe et omniprésence du géant américain Monsanto, face auquel il fait figure de petit poucet.

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Deux variétés de pommes de terre Ogm
attendent une décision européenne.
(© Terre-net Média)

« Les biotechnologies vertes sont un thème d'avenir »pour Basf, a déclaré récemment le patron du numéro un mondial de la chimie, Kurt Bock, lors de sa présentation de la stratégie du groupe pour 2020. Ce vocable de « biotechnologies vertes » recouvre notamment les Ogm, indispensables selon Basf pour répondre à une « méga-tendance »: nourrir une humanité de plus en plus nombreuse alors que les ressources se font de plus en plus rares.

« Nos efforts se concentrent sur le maïs, le soja, le coton, le colza et le blé »

Les activités agricoles ont aussi l'avantage de ne pas dépendre des cycles économiques, comme les polymères, plastiques et hydrocarbures que Basf livre habituellement à ses clients industriels. « Nos efforts se concentrent sur le maïs, le soja, le coton, le colza et le blé », détaille à l'Afp Peter Eckes, patron de Basf Plant Science, la branche du groupe qui développe ces Ogm. Concrètement, « après la pomme de terre renforcée en amidon Amflora (autorisée à la culture en Europe depuis 2010), nous attendons dans les deux prochaines années la mise sur le marché de soja Ogm au Brésil et de maïs résistant à la sécheresse aux Etats-Unis, en coopération avec Monsanto », ajoute-t-il. Amadea, version actualisée de l'Amflora destinée à l'industrie, et Fortuna, une pomme de terre Ogm qui doit finir directement dans nos assiettes, attendent déjà une décision européenne.

« Nous estimons que les activités de biotechnologies végétales devraient être rentables à partir de la deuxième moitié de la décennie », selon Peter Eckes. Les Ogm, dans lesquels Basf a commencé à mettre ses premiers deniers en 1998, continuent de représenter une part congrue de ses activités 750 salariés pour 150 millions d'euros investis annuellement dans la recherche et développement, quand le chiffre d'affaires global du groupe affiche 64 milliards d'euros (2010). « Pour l'instant c'est un domaine dans lequel de l'argent a été investi sans que ça ne donne quoi que ce soit », commente Ulle Wörner, analyste à la banque Lbbw.

« Les conditions réglementaires en Europe restent difficiles »

Pour « ne pas se retrouver en concurrence » directe avec des géants établis comme Monsanto, l'allemand a choisi de forger des alliances, explique Nadeshda Demidova, analyste chez Equinet. Il travaille avec de grands semenciers sur le génome des plantes afin de créer de nouvelles variantes, qui lui rapporteront des royalties lorsqu'elles seront mises sur le marché. Parmi les projets dans les éprouvettes: à l'horizon 2020, un nouveau colza développé avec l'américain Cargill pour extraire à moindre coût de l'huile enrichie en oméga-3 (autorisation demandée en Europe), des betteraves à sucre au rendement dopé, et du riz (avec l'allemand Bayer).

Au passage, ces partenariats sont moins risqués pour son image car « pour le grand public » il s'agira d'Ogm Monsanto par exemple, ajoute Mme Demidova. Sur ce thème, Basf marche sur des oeufs, comme tous les autres acteurs des Ogm qui agissent, méconnus, dans l'ombre du géant américain, dont le suisse Syngenta ou l'américain Pioneer, une filiale de Dupont. En tant qu'européen, le groupe « espère qu'il y a une plus grande confiance » même si « il reste un travail pédagogique absolument gigantesque à faire », a déclaré Jean-Marc Petot, directeur environnement et affaires publiques de Basf Agro France à l'Afp. « Les conditions réglementaires en Europe restent difficiles », déplore le patron de Basf, et « c'est pourquoi le noyau de nos activités se situe hors d'Europe, en Amérique du Nord et Amérique du Sud », où le groupe a notamment situé la plupart de ses laboratoire et champs d'essais. « Nous ne débutons plus de projets destinés au marché européen », ajoute M. Eckes.

Si Basf a usé de toute son influence pour arracher après une décennie de procédure l'autorisation européenne d'Amflora, bien qu'elle n'y ait quasiment aucune perspective commerciale, ce « n'est pas vraiment dans l'idée de gagner de l'argent, mais pour entrouvrir la porte, et commencer à rendre ses produits un peu plus acceptables », selon Ulle Wörner de la banque Lbbw. Une bataille loin d'être gagnée. En 2010, les autorités suédoises avaient trouvé dans un champ d'Amflora, déjà autorisée à la culture, des fleurs d'Amadea, non autorisée à la culture commerciale. Une banale « erreur humaine », s'était justifié le groupe, qui avait dû détruire ses champs.

 

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