Réforme de la Pac Momagri propose des mécanismes contracycliques pour stabiliser les revenus
A quelques jours de la réunion des chefs de gouvernement de l’Union européenne les 24 et 25 juin prochains, le think tank Momagri (1) présente une alternative à l’actuelle réforme de la Pac, qui compense les effets de la volatilité des prix, pour les principaux produits agricoles, en prenant en compte les coûts de revient. Dans l’hypothèse redoutée de coupes dans le budget européen, Momagri considère qu’il serait possible de mieux utiliser les fonds communautaires, voire avec des mécanismes contracycliques, d’économiser jusqu’à 60 Mds d’euros sur une période pluriannuelle.
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« Une autre Pac est possible » est le message que porte Momagri (1) aux instances représentatives de Bruxelles et aux chefs de gouvernement. L’idée n’est pas de revenir à une Pac du passé, mais de construire de solides mécanismes d’intervention en cas de crise
Le think tank Momagri (1) propose en effet une réforme de la Pac qui assure un revenu minimal rémunérateur, tout en allouant de manière plus rationnelle les ressources budgétaires grâce à des aides contracycliques. Articulée, comme celle actuellement en vigueur, sur deux piliers (avec un second pilier réservé au développement rural), les fonds publics du premier pilier mobilisés pour financer cette réforme, seraient essentiellement affectés à des outils de gestion des marchés agricoles permettant de prévenir les crises, mais aussi de lutter contre leurs effets, et non pas à des Dpu versés indépendamment de la conjoncture des prix et des coûts de production.
Ainsi, pour chacun des produits agricoles retenus (les céréales et les produits laitiers principalement), est défini un tunnel de variation libre des prix, à partir de leur prix de revient.
Un tunnel de variation libre de prix pour garantir un revenu minimum - Exemple du blé. (© Momagri) |
Par exemple, en se fondant sur un prix de revient de 215 euros, rémunération de l’exploitant comprise, pour une tonne de céréales, le marché est considéré par Momagri comme équilibré tant que les prix fluctuent dans un tunnel de 200 à 230 €. Autrement dit, le marché des céréales fonctionne correctement puisque la fluctuation des prix s’inscrit dans une fourchette de plus ou moins 7,5 % autour de ce prix pivot, dénommé par Momagri « prix d’équilibre ». Et dans ce cas de figure, la seule intervention publique serait « l’Aide de sécurité alimentaire » (Asa) de 75 €, versée par le budget de la Pac.
Cette Asa, perçue quelle que soit la conjoncture des marchés, comme le sont actuellement les droits à paiement unique, ne représenterait plus que le quart des Dpu moyens actuels. Elle rémunérerait les services d’intérêt public rendus par l’exploitant comme la gestion du territoire et l’ensemble des contraintes écologiques auxquelles il est soumis.
Si le prix de cette tonne de céréales prise en exemple sort, à la baisse, du tunnel de prix défini précédemment et jusqu’à un seuil de régulation publique (140 € dans notre exemple), l’exploitant toucherait une aide contracyclique du budget européen l’incitant au stockage privé et compensant en partie son manque à gagner. Par tonne de céréales, elle serait égale à la différence entre le prix du marché et le prix plancher de 200 €.
Avec un prix de vente supérieurs au « seuil de solidarité financière »
Et si le prix de marché de la tonne de céréales devient inférieur à ce « seuil de régulation publique » de 140 euros, il reviendrait alors à la Commission européenne de procéder, en complément, à des achats publics pour constituer des stocks (lire encadré) afin de retirer ces céréales du marché, dans la limite de 8 % de la production annuelle.
Mais, dans l’hypothèse où la conjoncture des marchés serait favorable avec des prix de vente supérieurs au « seuil de solidarité financière » (250 € la tonne de céréales dans notre exemple), tous les opérateurs effectuant des transactions sur le marché des céréales paieraient une taxe venant abonder les recettes du budget communautaire, ce qui contribuerait à limiter les phénomènes de spéculation.
La réforme de la Pac proposée par Momagri reposerait, comme aujourd’hui, sur un budget alimenté par les contributions des pays européens, ainsi que par le produit des taxes de solidarité collectées et les opérations de déstockage bénéfiques. Les mesures d’intervention seraient principalement employées pour payer l’aide de sécurité alimentaire, les paiements contracycliques et éventuellement les opérations de stockage public de régulation (lire encadré) rendues nécessaires pour détendre les marchés et faire converger les prix vers leur niveau d’équilibre. Autrement dit, pluriannuel, mutualisé et en partie autofinancé, le 1er pilier du budget de la Pac serait employé en priorité pour compenser les dérives des marchés. Et les crédits qui ne seraient pas consommés, alimenteraient un fonds de réserve pluriannuel utilisé au fil du temps, en fonction de la conjoncture.
Une économie supplémentaire de près de 60 milliards d’euros sur le budget de l’Union
Aujourd’hui, le projet de réforme de Momagri a été testé sur le blé avec succès et il est affiné sur le lait. Il repose sur la stabilité des marchés de quelques produits agricoles fondamentaux, car elle serait suffisante pour influer les marchés connexes comme ceux de la viande blanche ou des oléoprotéagineux.
Appliqué rétrospectivement sur les années 2006/2010, Jacques Carles, délégué de Momagri affirme que cette Pac alternative aurait permis de réduire de 8 milliards d’euros par an, en moyenne, le budget de l’Union européenne consacré à l’agriculture si il avait été mis en œuvre. Et simulé pour 2014/2020, une économie supplémentaire de près de 60 milliards d’euros sur le budget de l’Union serait réalisée. Soit une baisse des crédits de 15 % de budget agricole de l’Union européenne consacré à l’Agriculture qui pourraient être alloués à l’emploi, à la croissance, à l’investissement mais aussi à l’alimentation d’un fonds de réserve.
Une proposition plutôt en phase avec les syndicats agricoles En proposant des aides variables en fonction de la conjoncture des marchés qui compense les effets de la volatilité des prix agricoles tout en prenant en compte les coûts de revient, la proposition de Momagri répond à certaines revendications de syndicats et à leurs membres. |
L’assurance de percevoir un revenu
La conséquence majeure pour les agriculteurs serait, en effet, l’assurance de percevoir un revenu moyen minimum équivalent à ce qu’ils perçoivent aujourd’hui, mais sans les à-coups considérables qu’ils subissent. On leur redonnerait une perspective plus stable, propice à l’investissement et donc à l’innovation.
Mais pour que la réforme proposée par Momagri soit lancée sur de bons rails, on conçoit aisément que les prix du marché soient au moins supérieurs ou égaux au seuil de régulation publique, afin que le dispositif à mettre en place ne commence pas par des interventions publiques massives du budget européen. Cela ne devrait pas être bien difficile vu la conjoncture actuelle.
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