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Groupes coopératifs Le scandale du cheval ébranle le monde des coopératives agricoles

L'affaire de la viande de cheval a mis en lumière le gigantisme croissant des coopératives agricoles qui fonctionnent aujourd'hui davantage comme des multinationales que comme des outils mutualistes au service de leur terroir.

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Lur Berri comprend des activités agricoles classiques de production de légumes, semences, bovins, ovins et porcs
mais aussi de l'industrie agroalimentaire (frites, foie gras, saumon...). (© Terre-net Média)
Le Salon de l'agriculture s'ouvre samedi en plein scandale d'une fraude massive ayant fait passer du bœuf pour du cheval dans quelque 4,5 millions de plats préparés. Derrière le fournisseur de viande incriminé, Spanghero, se cache non pas un industriel privé classique mais une coopérative agricole : Lur Berri, sise dans les Pyrénées-Atlantiques.

Pour la Confédération paysanne, syndicat agricole minoritaire rendu célèbre par son ancien dirigeant José Bové, cette affaire de viande de cheval est bien la preuve que les coopératives fonctionnent aujourd'hui comme des « multinationales », dont l'objet est « basé seulement sur la recherche du profit maximum ». Et le syndicat de dénoncer le « gigantisme » des groupes coopératifs « dont les paysans ont été dépossédés ».

Les coopératives représentent 40 % de l'agroalimentaire français

Exemple, Lur Berri : sa structure, complexe, comprend des activités agricoles classiques de production de légumes, semences, bovins (50.000 têtes environ), ovins (80.000 têtes) et porcs (120.000 têtes). Mais aussi de l'industrie agroalimentaire notamment via des participations dans Lutosa (frites), Adp qui fournit l'espagnol Martiko en foie gras et saumon ou Arcadie (abattage/transformation de viande). En 2012, le groupe a pris une participation majoritaire (62,9 %) dans les foies gras et saumons Labeyrie. Résultat : sur son exercice 2011/2012, son chiffre d'affaires a bondi de 85 % à 1,12 milliard d'euros et l'excédent brut d'exploitation de presque 400 % à 86,1 millions. 40 % de l'agroalimentaire français

C'est peu connu, mais les coopératives agricoles, qui emploient plus de 160.000 personnes, représentent 40 % de l'agroalimentaire français. La Confédération dénonce la démultiplication des filiales et le Modef, syndicat ultra-minoritaire proche des communistes, appelle les 5.000 agriculteurs adhérents de Lur Berri à reprendre la main sur leur outil face à des dirigeants qui ont commis, estime-t-il, « des fautes graves ».

Benoît Hamon, le ministre délégué à l'Economie sociale (chargé à ce titre des coopératives) et à la Consommation, a reconnu mercredi devant des sénateurs que « le monde coopératif est très ébranlé par ce qui se passe ». « Le président de Coop de France, Philippe Mangin, voit bien l'impact » possible de cette affaire, « même si à ce stade, la coopérative Lur Berri n'est évoquée qu'à la périphérie de l'affaire », explique-t-il. Mais ce qui est en cause, a poursuivi le ministre, « c'est la gouvernance et certaines méthodes assez éloignées de ce qu'était à l'origine le modèle coopératif ». « Se posera donc la question du toilettage de la loi de 1947 » sur la coopération, annonce-t-il.

Etre compétitif au niveau européen

L'opération sera délicate car derrière, c'est aussi la compétitivité des coopératives qui se joue. Elles se concentrent, ne cessent de grossir, nouer des partenariats : sur les dix premiers mois de 2012, le secteur a enregistré 80 opérations, des fusions entre coopératives mais aussi des acquisitions d'acteurs privés, selon Coop de France. « Ce mouvement de restructuration s'avère crucial pour les coopératives agricoles françaises qui veulent rivaliser avec leurs concurrents » néerlandais, allemands et scandinaves, surtout avec un budget Politique agricole commune qui s'annonce plus maigre à l'avenir, souligne le cabinet Xerfi dans une étude publiée mercredi.

La première coopérative française, InVivo, figurait ainsi, en 2011, seulement au 7e rang européen et au 14e rang mondial du secteur, selon Xerfi. Et à titre de comparaison, le chiffre d'affaires de Lur Berri est plus de 10 fois inférieur à celui d'une des plus grosses coopératives au monde, la néo-zélandaise Fonterra (12,4 milliards d'euros de ventes).

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