Rapport du Centre d'analyse stratégique Les régions inégales face aux futures ressources en eau
PARIS, 03 avr 2013 (AFP) - Une grande inégalité des régions françaises devant les ressources en eau se profile à l'horizon 2030, indique mercredi un rapport du Centre d'analyse stratégique (CAS) qui pointe le Sud-Ouest et les bassins Seine-Normandie et Rhône-Méditerranée comme des territoires à risque, dans le contexte de réchauffement climatique.
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Si le CAS note que « le territoire métropolitain français est globalement bien pourvu en ressources en eau », il existe de « très fortes disparités », ce qui explique qu'aujourd'hui « certaines régions peuvent connaître d'importantes tensions sur la ressource à certaines périodes de l'année ». En l'occurrence en été et en automne, au moment de certains pics d'usage (développement des cultures, périodes touristiques, arrosage de jardins, remplissage de piscines, douches fréquentes, etc.).
Le rapport inscrit les futurs besoins dans un contexte marqué par le réchauffement climatique. « La quasi-totalité des projections disponibles indiquent sous la latitude métropolitaine une tendance à la baisse des précipitations moyennes, surtout l'été et l'automne », rappelle le CAS tout en soulignant « les fortes incertitudes sur les baisses effectives à attendre ». En se projetant en 2030, le CAS estime que « les régions qui semblent le plus à risque sont celles qui connaissent déjà aujourd'hui un déficit chronique sur la ressource comme les bassins Seine-Normandie, Adour-Garonne et Rhône-Méditerranée ».
Dans le bassin Seine-Normandie, qui présente déjà des zones en déséquilibre (eau potable pour l'Ile-de-France et irrigation en Beauce), « les projections montrent que le changement climatique devrait aggraver » cette situation. L'alimentation de la région francilienne « pourrait ainsi devenir préoccupante d'ici 2030 ».
Dans le bassin Adour-Garonne, dans le Sud-Ouest, les problèmes sont concentrés dans les plaines, densément peuplées et lieux de cultures gourmandes en eau (surtout le maïs). Or, une forte croissance démographique y est prévue (+ 1 million en 2050) tandis que la Garonne devrait voir son débit diminuer de 20 à 40 % d'ici là.
Quant au Rhône, le fleuve français le plus puissant mais aussi un axe fortement sollicité (production énergétique, irrigation, industries, eau potable, navigation), « sa capacité future à satisfaire tous les usages » est en question. D'autant qu'on assiste à « une multiplication des prélèvements sur le Rhône et ses affluents qui devrait continuer » avec une forte croissance démographique en Paca, Languedoc-Roussillon et en Rhône-Alpes, une potentielle future irrigation de la vigne et la possible desserte de nouveaux territoires (Causses, Lozère, Vercors, etc.). Le débit moyen annuel du Rhône d'ici 2050 pourrait ainsi potentiellement baisser de 14 à 36 %, selon cette étude.
«Il n'y a pas de catastrophisme à avoir à l'horizon 2030», juge Sébastien Chazot du cabinet BRL Ingéniérie, qui a réalisé l'étude pour le CAS. « Mais la France doit se préparer dès aujourd'hui à un climat plus sec, surtout dans le sud-ouest », insiste-t-il.
48 % de l'eau consommée par l'agriculture
Les marges d'action ne semblent pas principalement chez les particuliers, dont la consommation individuelle est en baisse constante depuis des années, grâce aux campagnes de sensibilisation et aux progrès des appareils électroménagers. Pour autant, le CAS, dans un autre rapport, préconise une tarification de l'eau incitant encore plus à des économies dans les régions à risque avec une augmentation de la part variable et une baisse de l'abonnement, et même « une tarification progressive et/ou saisonnière ».
L'agriculture, qui représente 48 % de l'eau consommée, est un secteur où il faut agir, car « en l'état actuel des cultures, la demande en eau pourrait nettement augmenter du fait du changement climatique ». Mais au delà du facteur climat, « il y a une très forte incertitude sur la demande agricole », qui dépendra surtout des politiques agricoles et environnementales, note Sébastien Chazot.
Depuis une vingtaine d'années, les surfaces irriguées en France se sont stabilisées, sous l'impulsion de la Politique agricole commune (Pac), relève l'expert.
Toujours dans le secteur agricole, Hervé Guyomard, directeur scientifique à l'Inra, sollicité par les auteurs du rapport, estime qu'il faut « travailler sur des variétés de semences plus économes en eau, à une irrigation plus précise et à des modes de production renouvelés ». D'où « d'importants besoins de formation et de conseil », souligne-t-il.
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