Colza sous couvert de légumineuses Bernard Gabaud (agriculteur) : « Le colza ne souffre plus pendant l'hiver »
Face à des adventices devenues trop envahissantes, Bernard Gabaud a décidé, il y a quatre ans, de modifier l'itinéraire technique de son colza. Aujourd'hui, les 25 ha dédiés à cette culture sont implantés en semis direct, sous couvert de légumineuses. L'expérience situe plutôt l'intérêt de la pratique au niveau de la nutrition azotée de la culture.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Bernard Gabaud, agriculteur à Villedieu-sur-Indre dans l’Indre, sur 180 ha de colza, blé, orge et légumineuses porte graines. (© Terre-net Média) |
Vous cultivez du colza sous couvert. Quel est le premier avantage de cette technique selon vous ?
C'est l'économie d'azote même si ce n’est pas cela qui m’a motivé au départ. Je gagne en moyenne une trentaine d’unités par hectare sur la campagne. De plus, la présence de la légumineuse dès le démarrage de la culture évite les ruptures d’alimentation. Le manque d’azote normalement observé à la mi-octobre, qui fait rougir le colza pendant la phase hivernale, est comblé. La plante ne souffre plus au cours de cette période.
Gilles Sauzet (Cetiom) : « Au niveau des adventices, la gestion facilitée de l’infestation est plutôt une conséquence positive du semis direct à vitesse réduite, 6 km/h. En effet, avec cette technique, il n’y a pas de flux de terre donc pas de levée de dormance. » (© Terre-net Média) |
Pourquoi avoir changé vos pratiques ?
Ce sont les problèmes de désherbage qui m’ont poussé, en premier lieu, à modifier mon itinéraire cultural. L’adventice la plus problématique reste le géranium : les herbicides n’atteignent que 50 à 70 % d’efficacité, pour un investissement très important avant même que les colzas n’aient levé. Certaines espèces de plantes compagnes ont un pouvoir couvrant qui concurrence les mauvaises herbes mais c’est surtout le fait de semer en direct qui intervient. En effet, à petite vitesse, il n’y a pas de flux de terre, ni de levée de dormance suite aux blessures des graines de géranium. Les conditions ne sont pas propices à la germination des semences de mauvaises herbes et seul le colza lève. Cependant, avec le semis direct, l’implantation de la culture est plus lente. Il faut prévoir d’avancer la date de semis au 15-20 août.
Avez-vous pu alléger votre stratégie herbicide en conséquence ?
La herse prend le relais au printemps pour le désherbage. (© Terre-net Média) |
L’année prochaine, je testerai la bineuse au stade 4 feuilles, suivie d’un passage de herse étrille à 7-8 feuilles plutôt qu’à 5-6 feuilles.
Comment choisissez-vous les espèces que vous associez au colza ?
Les différences de forme et de taille des graines stabilisent le mélange. (© Gilles Sauzet) |
En plus des caractéristiques physiologiques, je regarde la taille des graines pour constituer un mélange le plus homogène possible. La stabilité de l’ensemble dépend des différentes formes et tailles présentes. La féverole, par exemple, pourrait être intéressante d’un point de vue agronomique mais sa graine est vraiment volumineuse et son Pmg beaucoup trop élevé. Il faudrait une féverole à petite graine… La gélivité de l’espèce est enfin primordiale. Même si à défaut de gel suffisant à la destruction du couvert, un désherbage en viendra à bout.
Comment se déroule la phase de semis ?
J’ai transformé un semoir de 1975 en l’équipant de chasse débris Yetter pour la paille et les cailloux. J’ai installé trois caisses pour le colza, les légumineuses et l’anti-limaces, pour tout semer sur la même ligne, un rayon sur deux, tous les 34 cm.
Le semoir fait maison avec trois caissons pour implanter le couvert, le colza et l'anti-limaces. (© Terre-net Média) |
Pour limiter la concurrence avec le colza, l’expérience a montré qu'il valait mieux éviter de positionner les légumineuses en interligne. Et puis, quand toutes les plantes cohabitent, nous observons une sorte de synergie qui s’opère, avec des effets qui vont au-delà de ce que nous pouvions attendre. Le système racinaire du colza notamment devient trois ou quatre fois plus dense. L’idéal, pour conserver l’homogénéité du mélange et éviter le tri, est de ne pas trop remplir le semoir avec juste de quoi implanter 4 à 5 ha. Enfin, la caisse des semoirs Accord est bien adaptée, avec un système de vidange instantané du fond de la trémie.
L’achat d’un sac de semences de plantes compagnes de 25 kg, dose conseillée pour un hectare, revient à 50 €. Cependant, le mélange final avec le colza reste à faire, sauf si le semoir est muni de plusieurs caisses. C’est d’ailleurs ce point, avec le choix des variétés et la réalisation du mélange, qui constitue le principal frein à la mise en place de la technique. Sinon, financièrement, l’économie d’azote sert à couvrir le coût de la semence de plante compagne. Une opération blanche au final.
Un exemple de mélange à associer au colza, constitué de vesce commune, vesce pourpre et trèfle d'alexandrie. (© Gilles Sauzet) |
Pour accéder à l'ensembles nos offres :