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Outils mécaniques et grandes cultures Gratter l’inter-rang et pulvériser le rang, le must !

Le désherbage mécanique peut s’envisager comme l’une des possibilités techniques de contrôle des adventices en complément ou substitution des herbicides chimiques. Et en pratique, cela peut s’avérer une brillante idée.

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L’équipement betterave est tout à fait adapté au colza et permet d’amortir semoir et bineuse sur deux têtes de rotation. (©Terre-net Média)

En grandes cultures, trois outils de désherbage mécanique sont disponibles : la herse étrille, la houe rotative et la bineuse, dans des configurations variables. S’ils agissent de façon différente avec chacun des spécificités, leur efficacité dépend du respect de certains principes :

Loin d’un modèle unique

Les conditions météo et l’état du sol sont donc des critères importants à prendre en compte pour garantir la qualité du désherbage, d’où par contre l’impossibilité d’établir des itinéraires techniques fixes. Pour les passages mécaniques, il est préférable d’avoir un sol ressuyé le jour de l’intervention et pas de pluie prévue dans les jours suivants pour éviter le repiquage des adventices déchaussées. Le désherbinage, qui consiste à désherber l’inter-rang en mécanique et le rang en chimique par pulvérisation localisée, est encore plus exigeant. Il impose de combiner un sol ressuyé, des conditions hygrométriques favorables au traitement chimique et deux à trois jours sans pluie après l’intervention.

Par ailleurs, en céréales par exemple, un passage tardif de bineuse, malgré son efficacité à nettoyer la parcelle des adventices alors à un stade développé, pénalisera la récolte. En effet, l’outil manque de sélectivité vis-à-vis de la culture en place.

Sur céréales d’hiver, les stratégies mixtes composées d’un premier passage de type herbicide, complété par une intervention mécanique, se révèlent efficaces uniquement lorsque la pulvérisation a lieu à l’automne. Le complément mécanique fait alors disparaître 85 et 98 % des mauvaises herbes. Un résultat en chute de 20 points pour la combinaison traitements de printemps suivis de passages d’outils. La bineuse, capable de gérer les adventices développées, semble le matériel à privilégier en intervention finale. Ceci dit, elle diminuerait les rendements, alors que les stratégies utilisant la herse étrille donnent de bons résultats. Alors même si l’outil permet une meilleure gestion des mauvaises herbes, son agressivité pour la culture doit être prise en compte.

ATTENTION AUX STADES

En betteraves, l’alternance des pulvérisations et des passages mécaniques obtient parfois de meilleures performances que le tout chimique. Cependant, selon l’Institut technique de la betterave (Itb), compte tenu des exigences de population de la culture et du coût des semences, les outils ne doivent être utilisés qu’entre les stades 4 et 12 feuilles. En effet, la bineuse à moulinets ou la houe, passées précocement, peuvent entraîner des pertes de plantes, de l’ordre de 5 à 20 % selon les situations. La betterave ne souffrant aucune concurrence d’adventice, il convient donc d’intervenir au démarrage avec des herbicides pour contenir les levées. Au-delà de 10-12 feuilles, la houe provoque des dégâts par éclatement.

L’efficacité de la houe ou de la bineuse à moulinets est également intimement liée au stade des adventices. Elle est bonne avant le stade deux feuilles de celles-ci et peut chuter rapidement au-delà. Elle est relativement faible sur les vivaces et les graminées. Pour construire un itinéraire mixte et choisir l’outil approprié, il faut donc penser aux conditions d’intervention mais aussi aux différents stades des plantes.

ITINÉRAIRES CONSEILLÉS

Selon les Cuma de Basse-Normandie, « la mise en œuvre d’un désherbage mixte sur céréales d’hiver, stratégie efficace mais globalement moins régulière que le tout chimique, va largement dépendre des conditions pédoclimatiques et restera une affaire d’opportunités ».

Les programmes les plus efficaces incluent cependant un passage précoce d’outil, à l’automne, afin de contrôler les adventices à un stade jeune, et un complément herbicide qui pourra être modulé. « La limite, selon Ludovic Bonin d’Arvalis-Institut du végétal, est l’éventuelle présence de graminées résistantes. » L’introduction de la mécanique est donc à raisonner au cas par cas, après identification préalable des cibles à gérer prioritairement. « Face aux graminées, a fortiori résistantes, mieux vaut un herbicide d’automne suivi, en sortie d’hiver, de passages de herse étrille par exemple, la bineuse pénalisant le rendement. Inversement, si ce sont les dicotylédones qui posent problème, l’itinéraire pourra être basé sur un désherbage mécanique à l’automne avec un herbicide en complément final. »

L’analyse statistique des jours disponibles d’Arvalis-Institut du végétal montre qu’il y a potentiellement plus de créneaux pour les interventions mécaniques de sortie d’hiver, du tallage au début de la montaison. Ces données, couplées aux résultats d’essais, permettent de décrire quelques itinéraires conseillés. Globalement, l’avantage est, tout de même, à l’intervention mécanique en premier, suivie du rattrapage chimique.

Semis classique : 

- Herse étrille en prélevée + herse étrille au tallage en sortie hiver + rattrapage chimique

- OU deux passages de herse étrille en sortie hiver si les interventions d’automne n’étaient pas possibles + rattrapage chimique

Semis large écartement :

- Binage aux stades tallage-début montaison + rattrapage chimique

Désherbage mixte du blé. (©Pierre Mischler, AgroTransfert RT)

Selon l’Itb, il est impossible de se passer d’herbicides sur betteraves mais de nombreux itinéraires permettent de concilier réduction d’Ift et propreté finale des parcelles comme :

- réaliser deux à quatre traitements herbicides en plein afin d’arriver sereinement au stade 4 feuilles ; puis intervenir en mécanique, deux à quatre fois, avec une bineuse traditionnelle équipée de moulinets sur le rang ou avec une houe rotative → efficacité : 8/10 ; réduction d’herbicides : 50 à 65 % selon le nombre de passages.

- désherber avec une rampe de localisation d’herbicide, voire une désherbineuse, puis compléter par un ou plusieurs passages de bineuse → efficacité : 8 à 9/10 ; réduction d’herbicides : 65 à 80 %.

« Seules les modalités avec désherbinage présentent des résultats comparables aux pulvérisations en plein et ce, même à des stades jeunes. »

Le Cetiom a également montré l’intérêt, cette fois en colza, de la pulvérisation localisée sur le rang au semis, suivie d’un binage, surtout du fait de pouvoir intervenir en post-levée et d’efficacités équivalentes à celles des références chimiques appliquées en plein, voire supérieures en présence de flores difficiles à maîtriser (géraniums, crucifères). « Cette technique permet, en plus, de réduire de 60 % le volume de produit appliqué à l’hectare. Et cela s’accompagne souvent d’une amélioration des performances économiques puisque la réduction des charges herbicides compense largement le surcoût lié au binage (main-d’œuvre et charges de mécanisation). » Semer le colza en grand écartement pour contrôler le salissement de la parcelle par binage apparaît alors comme une étape vers la réduction de l’utilisation des herbicides.

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