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Agro-écologie vs production intensive La loi agricole divise l'Assemblée

PARIS, 09 jan 2014 (AFP) - Tournant agro-écologique prôné par la majorité, contre intensification de la production défendue par l'UMP : le projet de loi d'avenir pour l'agriculture discuté jusqu'à la fin de la semaine à l'Assemblée voit s'affronter deux visions dans un contexte de concurrence mondiale aiguë.

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Ce projet de loi examiné en première lecture ambitionne de renforcer la compétitivité des filières (agriculture, agroalimentaire et forêt) tout en prenant le virage de l'agro-écologie, définie comme un « système de production » alliant « autonomie des exploitations » et meilleure protection de l'environnement.

Pour le chef de file des députés UMP Christian Jacob, lui-même ancien exploitant comme de nombreux orateurs sur tous les bancs, le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll « s'enferme uniquement sur un concept environnemental », ce qui est « catastrophique pour le développement » du secteur, a-t-il tonné mercredi soir dans l'hémicycle. Face à une demande mondiale en forte expansion, c'est le moment selon lui « d'être très offensif et très agressif sur les marchés ».

Même si la France reste la première puissance agricole d'Europe, elle est passée en dix ans de la place de 2e exportateur agroalimentaire mondial à la 5e. Plusieurs intervenants de l'opposition ont accusé la majorité de vouloir « hiérarchiser les différentes formes d'agriculture » ou de « vouloir changer le métier d'agriculteur » en renonçant à en faire « un producteur », réduisant l'agriculture à « une activité occupationnelle, ludique ».

En réaction, le socialiste Yves Daniel, « producteur de lait et de porc bio », s'est érigé jeudi en exemple en assurant vivre de son métier et ne pas être « un paysan bobo ».

Amendement pour le bio

Pour sa part, Stéphane Le Foll soutient que son texte doit donner aux agriculteurs « les capacités de pouvoir anticiper l'avenir » et de « préparer la performance » du secteur « à l'échelle mondiale ». D'après lui, l'environnement est « un enjeu de notre compétitivité », ce qui ne cesse d'alimenter les soupçons de l'UMP sur des gages donnés aux turbulents alliés écologistes.

Ces derniers sont parvenus à faire voter un de leurs amendements introduisant la promotion de « la conversion à une agriculture biologique » comme l'une des finalités de la politique agricole, suscitant un tollé à droite. L'UMP Nicolas Dhuicq a parlé d'un retour « à un système d'exploitation post-néolithique » et à « l'âge d'or idéal d'avant l'apparition de la chimie ».

Les députés se sont penchés jeudi sur le levier de cette agro-écologie, les « groupements d'intérêt économique et environnemental » (GIEE), sorte de label qui doit permettre à des agriculteurs se regroupant de bénéficier d'aides de manière préférentielle ou majorée. Cette mesure phare du projet de loi a été saluée comme la « voie du futur » (PS) et une « avancée concrète » (Front de gauche) permettant d'« inverser les courbes du déclin agricole français » (radicaux de gauche). Ces groupements doivent « favoriser les circuits courts » de distribution, a aussi fait valoir la radicale de gauche Dominique Orliac, critiquant « les pommes du Chili » servies même « dans les restaurants de l'Assemblée ».

Pour sa part, l'UDI a demandé de la vigilance sur la distribution des aides publiques. Mais là encore, pour l'UMP, « la priorité c'est bien la compétitivité, la simplification, l'allègement des charges » et « pas de faire des kolkhozes écologistes », a lancé pour le groupe Jean-Louis Costes.

En ce jour où François Hollande appelait à intensifier le « choc de simplification » en France, son collègue UMP Martial Saddier a ironisé sur Stéphane Le Foll, « un des ministres les plus proches du président », allant selon lui en sens inverse avec son dispositif des GIEE. « Vous avez déjà perdu le combat idéologique, vous êtes en retard sur le terrain », leur a rétorqué le rapporteur socialiste Germinal Peiro, s'appuyant sur les 469 réponses à un appel à projets préfigurant les GIEE, dont 103 ont été sélectionnés, représentant quelque 3.500 agriculteurs.

Le projet de loi, qui sera voté solennellement mardi, contient aussi des dispositions pour encadrer davantage l'usage des antibiotiques dans les élevages et des produits phytosanitaires dans les champs. 

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