Coordination rurale Bernard Lannes : « On veut nous réduire à de simples producteurs de minerai »

Premier syndicat à présenter ses traditionnels vœux à la presse mercredi 4 janvier 2017, la Coordination rurale n’a pas manqué de rappeler son slogan d’origine : « Des prix, pas des primes ». Et le syndicat de s’alarmer sur la situation de plus en plus difficile des producteurs « dans l’indifférence générale ».

« Tant que nous n’obtiendrons pas rapidement des prix rémunérateurs, quelle que soit la production, il n’y aura pas d’amélioration chez les producteurs », a fustigé Bernard Lannes, président réélu pour un nouveau mandat de trois ans à la tête du deuxième syndicat agricole. « Dans cette situation, les jeunes qui s’installent aujourd’hui sont de la chair à canon du système agricole ».

« Revendiquer un prix du lait de 320 €/1 000 l alors qu’on sait bien que les coûts de production sont en moyenne plus élevés, c’est mentir et ne pas défendre convenablement notre métier », a renchéri Véronique Le Floc’h, présidente de l’OPL et nouvelle secrétaire générale de la CR, évoquant la ligne du syndicalisme majoritaire.

Selon le syndicat, plus de 30 % des agriculteurs auraient besoin entre 80 000 € et 100 000 € de trésorerie pour renflouer leur exploitation. « Mais ces derniers n’ont pour le moment aucune garantie d’être suivis par leur banque ». La CR dénonce au passage un « plan Valls-Beulin qui ne fonctionne pas » : « Le cautionnement bancaire de BPIFrance ne fonctionne pas. A peine 200 dossiers ont été déposés à la BPI, explique Bernard Lannes. On fera les comptes dans quelques mois, lorsque le gros des dossiers va arriver. »

Mais, poursuit le syndicaliste, « les banques estiment de leur côté qu’elles pourraient être mises en cause pour soutien abusif dans 30 % des dossiers agricoles ». De quoi, selon lui, donner aux banques un argument pour ne pas aider certains agriculteurs en difficulté, même avec le cautionnement public. La CR conseille déjà à certains producteurs de recourir aux services de l’association Aplomb (association pour la légalité des opérations et mouvements bancaires).

Toujours concernant la conjoncture économique difficile et les mesures du plan Valls, la CR se félicite de l’annulation de l’obligation de se retirer à vie du métier d’agriculteur lorsqu’on demande les aides à la reconversion. « Imposer à vie à un agriculteur souhaitant se reconvertir de ne pas se réinstaller en agriculture sous prétexte qu’il a bénéficié de 3 000  € d’aides à la reconversion était totalement aberrant. »

La CR contre l'assurance privée dans la Pac

Sur le plan européen, la Coordination rurale compte se battre contre la mise en place de systèmes assurantiels. « On ne peut pas croire qu’un système assurantiel permettra à un producteur qui vend à perte de s'en sortir. D’autant plus que les assureurs ont besoin de garanties. » Le syndicat défend, comme la Confédération paysanne, la mise en place d'outils de régulation des volumes et des prix.

« Qu’il s’agisse du plan Valls-Beulin, ou d’un système assurantiel dans la prochaine Pac, le système défendu par le syndicalisme majoritaire ne sert qu’à nous réduire, nous agriculteurs, à de simples producteurs de minerai. De ce système de cogestion, il n’y a que les intermédiaires qui en profitent », a encore martelé Bernard Lannes.

Revendiquant être le seul syndicat à défendre « le producteur et sa production jusqu’à la sortie de sa ferme », la Coordination rurale compte sensibiliser les candidats à la Présidentielle 2017 sur la réalité de la situation agricole, « avec de vraies fermes, de vrais agriculteurs et de vrais chiffres ». Le syndicat souhaite accueillir les candidats à l’Elysée dans l’une des dix fermes sélectionnées pour l’occasion.