Viviane, soudeuse chez Manitou, une pionnière qui s’épanouit à l’usine
Le machinisme, ce sont des hommes et de plus en plus de femmes. Viviane Gicqueau, 55 ans, manie la torche chez le leader mondial de la manutention depuis 2004. Elle nous raconte son parcours et l’évolution des mentalités. Portrait.
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Sur les lignes de l’usine Manitou Group d’Ancenis, quelques « Maman » résonnent parfois. « Les plus jeunes m’appellent comme ça ! Sinon, c’est Vivi », sourit Viviane Gicqueau. À 55 ans, cette soudeuse fait partie des premières femmes à avoir, torche à la main, assemblé les célèbres machines du constructeur. « Je suis arrivée en 2004, raconte-t-elle. Il a fallu prouver qu’on avait notre place ! » Aujourd’hui, l’usine abrite plus d’une cinquantaine de femmes sur les différentes lignes de production.
Pour Viviane, tout a commencé par une formation de 5 semaines, proposée par l’ANPE, l’ancêtre de France Travail. « C’était chez TRA-C Industrie à Carquefou. On s'entraînait sur des pièces Manitou ». Rien ne prédestinait Viviane à un univers de flammes et de métal. Titulaire d’un BEP Vente, passée par le monde de la chaussure, la confection de chemisiers, le conditionnement, elle n’avait « jamais pensé à l’industrie ».
« Il y a un côté ludique »
Très vite, Viviane trouve ses marques : « C’est drôle d’assembler. Il y a un côté ludique ». Ses souvenirs d’enfance remontent alors, des heures passées à modeler la terre ou encore une presse à bûches confectionnée au collège en 4e qu’elle a gardé des années. Grande bricoleuse, elle relooke des meubles, tricote… « Je suis assez habile. Je me sens bien quand je créé », confie-t-elle.
Sa qualification en poche, elle rentre chez Manitou Group en intérim, comme tous les futurs salariés. Un tuteur, Michaël Cuvelier, l’épaule. Ils sont restés en contact : « Il est devenu chef. Il sait qu’il peut compter sur moi ».
« Les mentalités ont évolué »
Si son mari, Philippe, la soutient, Viviane doit faire face à des réflexions, sur l’air du « Ce n’est pas un métier pour les femmes ». « À l’époque, beaucoup de femmes étaient mères au foyer. Il y avait parfois des petites piques. Les mentalités ont bien évolué depuis. Je me suis toujours sentie bien chez Manitou Group. Je suis respectée. J’ai noué des amitiés au travail, tant avec des hommes qu’avec des femmes d’ailleurs ».
« C’est un engagement fort de l’entreprise, à tous les échelons. C’est une femme, Jacqueline Himsworth, qui dirige le Conseil d’administration. Il y a aussi trois femmes, sur 7 membres, au sein du Comité exécutif », met en avant Franck Lethorey, responsable communication externe de Manitou Group.
« Tout le monde peut y arriver »
Les évolutions techniques ont également rendu le quotidien de Viviane plus accessible. Quand elle a débuté, elle réglait son poste à l’écoute. Cagoules ventilées, torches aspirantes, appareils de levage… « C’est le poste qui s’adapte à nous et plus l’inverse », résume-t-elle. Une collègue actuelle de Viviane était avant… aide-soignante. « Tout le monde peut y arriver. Nous avons même une nouvelle école de soudage en interne depuis l’année dernière ! Si une jeune fille veut se lancer dans le métier, je l’encourage. »
Les qualités de Viviane, « dynamique, précise et volontaire », ont vite été repérées. Chez Manitou Group, elle est la première femme à travailler avec les robots de soudure. « L’automatisation, c’est bien, on met la pièce, on lance et c’est parti. Mais je préfère quand- même mettre la main à la pâte », avoue-t-elle.
Transmettre le « savoir-faire des anciens »
Sa grande polyvalence l’amène à changer régulièrement de poste. « Je ne sollicite pas toujours le même geste, c’est mieux pour le corps », explique-t-elle. Son expertise l’a conduite vers la formation : « J’adore ça. J’aime transmettre le savoir-faire des anciens. Je suis très diplomate. Avec les jeunes d’aujourd’hui, il faut être pédagogue ! »
Pour autant, Viviane ne souhaite pas « prendre plus de responsabilités ». « Je suis fière de mon parcours et je suis bien à ma place », tranche-t-elle. Elle qui embauche sur les créneaux 5h/13h ou 13h/21h aimerait juste passer un jour en horaires « normaux ». « Mais je m’adapte. J’ai toujours réussi à faire la part entre la vie de famille et la vie professionnelle ».
La coiffure, un rêve d’enfant
Ses trois enfants en témoignent : Amélie, 31 ans et « bientôt maman », est ingénieure dans la tuyauterie, Clarisse, 28 ans, travaille dans le domaine des éoliennes et Alexandre, 25 ans, assure la maintenance chez le fabricant de bennes et remorques Thievin. Que des métiers liés à la technique : « Pendant les vacances, ils allaient tous travailler dans l’industrie. C’est important. Je voulais qu’ils comprennent ce que c’est ».
Viviane ne confesse qu’un seul léger regret : « En vrai, petite, je voulais être coiffeuse ! » Sa maman, mère au foyer, et son père, ouvrier dans l’industrie du polystyrène, n’ont pas pu lui payer cette formation. Avec l’allant qui la caractérise, Viviane a surmonté cette déception. Elle a même un modeste salon de coiffure à la maison avec un seul client… son mari. « C’est moi qui lui coupe les cheveux ! » clame-t-elle.
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