Cadmium : le vrai du faux
[Contenu proposé par La Pomme de terre française] Démêler le vrai du faux devient une activité à part entière… L’emballement médiatique, sur fond d’intérêts russes, au sujet du cadmium, métal lourd, en est le parfait exemple.
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Les Unions régionales de professionnels de santé-médecins libéraux (URPS-ML) ont alerté début juin le gouvernement sur « le cadmium, véritable fléau de santé publique ». Elles rappellent que ce métal lourd est cancérigène et qu’il s’accumule dans les sols, pour finir dans l’organisme humain « principalement exposé via l’alimentation, notamment les produits de base comme les céréales, les pommes de terre, les pâtes, le pain et les produits de panification ».
Une étude épidémiologique Esteban montre en effet que, chez les adultes français, l’imprégnation moyenne au cadmium a augmenté de 40 % entre 2004 et 2016.
Cette contamination est, selon ces médecins, très largement imputée à l’épandage d’engrais phosphatés. Ils appellent le gouvernement à s’aligner sur les recommandations de l’Anses, qui a renouvelé en novembre 2021 sa recommandation de porter la concentration maximale en cadmium à 20 mg Cd/kg P2O5 dans les engrais minéraux phosphatés. Soulignons que la valeur limite de teneurs en cadmium est depuis juillet 2022 passée de 90 à 60 mg/kg.
L’URPS annonce qu’elle sensibilisera ses patients « à la nécessaire modification de leur alimentation » et demande à l’État de « soutenir très fermement l’alimentation biologique, notamment dans les écoles. La contamination au cadmium dans le bio étant inférieure de 48 % en moyenne ».
Le décryptage
Dans un article très détaillé du 18 juin, le journal Le Point décortique l’emballement médiatique autour de cette affaire. La cible de cette campagne serait les engrais phosphatés marocains, sur fond d’intérêts russes. « Depuis février 2025, 100 % des engrais phosphatés livrés en Europe affichent une teneur en cadmium inférieure à 20 mg/kg », explique au journal un dirigeant du groupe OPC, le géant marocain des engrais qui fournit aujourd’hui à la France 53 % de ses engrais phosphatés.
« La teneur de cadmium dans les sols français, en moyenne de 0,31 mg/kg de terre sèche, n’a pas doublé en dix ans », indiquait pour sa part Thibault Sterckeman, agronome à l’Inrae à La Tribune ou à nos confrères de Réussir. Selon ce chercheur, « depuis la Seconde Guerre mondiale, l’apport d’engrais phosphatés en agriculture a beaucoup diminué, et ils ne peuvent à eux seuls être la cause de la contamination observée. La pollution atmosphérique y joue aussi un rôle ».
De son côté, Santé Publique France a confirmé au Point que « la première source d’imprégnation au cadmium chez les adultes reste le tabac, et dans une moindre mesure, la consommation de fruits de mer ».
Selon Le Point, la Russie se frotte les mains. « PhosAgro, géant russe du phosphate, finance la Safer Phosphates Foundation, une organisation affichant des préoccupations écologistes enregistrée aux Pays-Bas, dont les membres sont particulièrement actifs à Bruxelles. Elle s’est donné pour mission de discréditer les phosphates marocains et d’écouler les phosphates russes – naturellement pauvres en cadmium (moins de 5 mg/kg). »
Les médecins, auteurs de l’alerte, jurent toutefois « ne rien connaître de ces enjeux », mais confirment au Point « avoir été "sensibilisés" au sujet, par les campagnes de presse incitées par Safer Phosphates »…
L’hebdomadaire indique par ailleurs qu’entre 2021 et 2024, les importations d’engrais phosphatés russes ont quasiment doublé, passant de 402 000 à 793 000 t, selon Eurostat, « avant que le Parlement européen, conscient de financer l’effort de guerre russe par procuration, n’adopte le 25 mai 2025 une surtaxe de 6,5 % visant précisément les engrais phosphatés, pour limiter cette dépendance…
La campagne contre le cadmium, en France, rebondit quelques jours plus tard et juste avant l’entrée en vigueur des nouvelles taxes, le 1er juillet 2025… », révèle le journal.
Les actions de la filière
Du côté du CNIPT (Comité national interprofessionnel de la pomme de terre), le sujet du cadmium est pris très au sérieux, l’Anses identifiant comme principales voies d’exposition (hors tabagisme) les pains et produits de panification sèche, suivis des pommes de terre.
« Depuis le 5 avril 2002, les teneurs en plomb et en cadmium dans les pommes de terre font l’objet d’une limite réglementaire fixée à 0,1 mg/kg sur tubercules pelés (règlement (CE) n° 466/2001) », a rappelé Benjamin Louvrier, responsable recherche et qualité au CNIPT. Avec le soutien d’Arvalis et des acteurs de la filière, l’interprofession met en œuvre chaque année un plan de surveillance collaboratif sur la qualité sanitaire des pommes de terre.
« Le bilan des quinze dernières années révèle que la présence de cadmium est en moyenne de 0,026 mg/kg, ce qui est nettement inférieur à la réglementation européenne de 0,1 mg/kg, souligne-t-il. Au total, sur les 2 612 échantillons analysés, seuls 18 affichent un taux supérieur à la limite réglementaire. 99,3 % des lots sont donc conformes. Et lorsque l’un de ces échantillons révèle une valeur supérieure, cela enclenche une action de retrait ou de rappel des produits », rassure-t-il.
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