Protection du lin fibre : quelles stratégies gagnantes ?
Dans un contexte réglementaire et sociétal de plus en plus contraint, Arvalis se mobilise pour déployer des outils et alternatives de protection du lin fibre contre les bioagresseurs. La protection des cultures se complexifie mais des opportunités émergent.
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La protection des cultures est un enjeu majeur pour accompagner le dynamisme de la filière lin fibre : « produire autant, de façon rentable, dans un contexte climatique changeant et sous une pression réglementaire toujours plus intense », résume Nathalie Verjux, chef du service protection intégrée des cultures chez Arvalis, à l’occasion d’un colloque organisé à Amiens (Somme) le 28 janvier 2025 avec le Cipalin.
Dans la liste des substances actives de la DGAL susceptibles d’être retirées, beaucoup sont jugées comme majeures pour protéger le lin fibre des attaques d’altises, de la concurrence des adventices ou des maladies comme la verticilliose, la septoriose ou l’oïdium.
Gérer les altises dès l’implantation
L’altise est l’ennemi numéro 1 des linières. « Plusieurs facteurs sont susceptibles d’expliquer leur présence, mais le lin est particulièrement sensible au début de l’implantation » explique Elodie Gagliardi, ingénieure régional chez Arvalis qui préconise « de semer dans des conditions réchauffées et pas trop précocement, car il faut viser une levée rapide et homogène ». Sur la base du réseau de parcelles suivies par Arvalis depuis 2021, l’absence de mottes et de résidus de culture semble aussi limiter l’intensité des dégâts.
Concernant la lutte chimique, Elodie Gagliardi indique que les spécialités à base de cyperméthrine, étofenprox ou encore lambda-cyhalothrine restent efficaces à condition de respecter certaines conditions « Il faut privilégier les applications en fin d’après-midi (en présence d’altises), en ajustant le volume de bouillie (> 150 l/ha) et la taille des buses pour obtenir des gouttes petites à moyennes ».
Le désherbage mécanique à combiner
Tout au long du cycle cultural, la présence d’adventices est préjudiciable. Elles pénalisent le rendement, complexifient les opérations de triage pour la production de semences, et contribuent à augmenter le taux d’humidité des pailles au moment de la récolte. « Rotation des cultures, faux-semis, travail du sol sont des leviers agronomiques utiles pour casser le cycle des levées, épuiser et enfouir le stock semencier », rappelle Benoit Normand, ingénieur régional protection lin fibre. Les travaux sur le désherbage mécanique montrent des efficacités qui varient en fonction de la pression initiale, du type de flore, et de la fréquence de passage. « D’après nos essais, force est de constater que le tout mécanique donne rarement des résultats satisfaisants. Mais la combinaison intervention chimique en pré-levée et rattrapage mécanique est une piste intéressante », résume le spécialiste.
Au sujet de la lutte chimique, il faut rappeler la fin d’utilisation de l’Avadex 480, à partir du 29 mars 2025. Arvalis communique sur ses essais avec le Colzamid (à base de napropamide 450 g/l) . « L’efficacité semble au rendez-vous à condition d’intervenir en post-semis/pré-levée (48h max après le semis) à la dose de 1,5 l/ha », résume Benoit Normand.
Maladies : 21 % de rendement en moins
Oïdium, septoriose, verticilliose sont les principales maladies fongiques inféodées à la culture du lin fibre. « En moyenne, sur une dizaine d’année de notations, la nuisibilité moyenne des maladies est estimée à 440 kg/ha de perte (fibres longues) », précise Jeanne Fourny, ingénieure régionale. « Choisir des variétés tolérantes à l’oïdium permet de s’affranchir d’un fongicide en T1, mais n’exonère pas de faire l’impasse en fin de cycle », rappelle-t-elle.
Des solutions de biocontrôle à base de soufre sont testées et donnent des résultats intéressants mais pour l’heure ces solutions sont encore en cours d’homologation (Aquicine Duo) ou ne bénéficient qu’une homologation dérogatoire (Thiopron rainfree).
« Enfin s’agissant de la problématique de la verse, toutes les variétés n’ont pas la même sensibilité, et il faut limiter le peuplement à 1 600 plantes/m², au-delà, les plantes deviennent fragiles à cause de la concurrence », ajoute Jeanne Fourny.
Mobiliser les approches combinatoires
Pour Nathalie Verjux, la protection intégrée des cultures implique « de sortir de la logique : une solution pour régler un problème. La santé des plantes doit mobiliser une combinaison d’approches pour prévenir, diagnostiquer et intervenir ».
La maîtrise des bioagresseurs nécessite de poursuivre la recherche d’alternatives combinées aux produits phytopharmaceutiques. Des projets de recherche devraient pouvoir accroître les connaissances et permettre de construire des stratégies de lutte durables et efficaces ( Parsada, GramiCible, Altifast ou encore Trans-Pathoflax 2.0).
« À plus long terme, l’écologie chimique et sensorielle (médiateurs chimiques), l’étude et la compréhension du microbiote et des interactions entre plantes, devraient aussi ouvrir de nouvelles perspectives en matière de lutte », conclut Nathalie Verjux.
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