« Certes tout n’est pas tout beau tout rose, mais il faut positiver ! »
Tel est le message que veulent faire passer Miss et Mister agri 2026, élus il y a quelques jours. Passionnés et fiers de leur métier, ces jeunes installés ne nient pas les difficultés de l’installation et d’être agriculteur mais ils souhaitent avant tout véhiculer une image positive et promouvoir l’agriculture, leurs régions mais aussi des filières plus confidentielles.
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Première participation pour Mathis Lafargue. Sa tante voulait l’inscrire à un concours de mannequin. En cherchant sur internet, ils sont tombés sur Miss et Mister agri 2026 et se sont dits « pourquoi pas" ; d’une part, en raison du lien avec l’agriculture et de l’autre, de l’objectif derrière de communiquer sur, promouvoir et défendre le monde agricole. Crystèle Gourjade, elle, avait déjà tenté sa chance l’an dernier et était arrivée parmi les 20 finalistes, sans parvenir au podium. À travers leur présentation écrite et vidéo, leurs motivations et détermination ont convaincu les réseaux sociaux comme le jury.
Je suis dans une filière atypique, mais autant agricultrice que d’autres.
Maintenant qu’ils ont remporté le titre de Miss et Mister agri, ils sont encore plus motivés et déterminés à mettre en avant, à chaque occasion qui se présente et notamment au Salon de l’agriculture et au Sommet de l’élevage, leur métier d’agriculteur et agricultrice, leurs produits, leurs terroirs et bien sûr toute l’agriculture française. Crystèle a en effet choisi une production atypique : depuis septembre 2023, elle élève une soixantaine de chèvres Angora sur 38 ha dans le Tarn et est à la tête d’une ferme pédagogique de 150 animaux au total : des poneys, brebis, lapins nains, poules, canards, etc., d’ornement principalement.
« Tout le monde peut participer et gagner, met-elle en avant. Je me sens autant agricultrice que d’autres, je produis mes céréales et mon foin pour mon cheptel. » Installé tout récemment, en octobre 2025, Mathis cultive des céréales (blé, orge, tournesol entre autres) et un peu de semences de maïs et colza, dans le Lot, sur près de 60 ha. Il vend sa production céréalière à des coopératives et quelques meuniers pour la fabrication, 100 % locale, de farine puis de pain Croustilot. S’ils ont à cœur de faire découvrir leurs filières, ils tiennent à « représenter l’ensemble du milieu agricole ».
Communiquer !
Ils sont conscients de l’importance, dans ce secteur, de renforcer la communication pour montrer la réalité des choses et lutter contre les idées fausses qui circulent. « Tout en donnant une image positive », insiste Mathis, en parlant des avantages de cette profession : « travailler dehors, au contact de la nature et dans un bel environnement, effectuer des tâches diversifiées, suivre les cultures, de la graine semée à la récolte et surtout pouvoir exercer tous les jours sa passion ». « Et être son propre patron, ajoute Crystèle, gérer son entreprise et décider des directions à prendre et stratégies à mettre en place. »
Sans occulter les contraintes : « la dépendance au climat et les pics d’activité saisonniers où on ne compte pas nos heures et où ça peut être compliqué pour l’entourage », précise le jeune homme de bientôt 24 ans. « S’occuper des bêtes 7 jours sur 7, difficile d’avoir du temps pour soi, ses proches, les loisirs, les vacances mais avec la liberté de s’organiser comme on le souhaite, de se dégager quelques heures par-ci par-là », poursuit la jeune femme âgée elle aussi de 24 ans.
Dans son portrait sur Facebook : Mathis raconte ce qui lui a donné envie d’être agriculteur, ce qu’il aime dans son métier et pourquoi il s’est présenté à ce concours :
De même pour Crystèle :
Ils nous parlent de leur installation
L’autre difficulté évoquée concerne la rémunération. « Je n’arrive pas encore à me prélever de salaire. Ce n’est pas parce qu’on réalise du chiffre d’affaires qu’on y parvient de suite. J’espère commencer à en vivre en 2026 pour ma troisième année d’installation en agriculture », explique-t-elle. La jeune éleveuse a repris la ferme de son père, que les terres puisqu’il a dû se séparer, pour raison de santé, quelque temps plus tôt de ses bovins allaitants. Elle a dû investir dans un troupeau caprin, d’abord une vingtaine de chèvres et deux boucs, après s’être fait la main au début sur un effectif limité. Titulaire d’un BTS Acse, elle s’est formée à l’élevage de caprins Angora sur le tas, seule et en rencontrant d’autres éleveurs.
« L’absence de références est compliquée au départ », souligne-t-elle. Les deux tontes par an sont collectées par une coopérative spécialisée qui les transforme en laine et vêtements. Située dans le département, elle s’approvisionne auprès des 140 producteurs à l’échelle nationale et leur fournit la même gamme de produits, sous la marque « Mohair des fermes de France ». À eux ensuite de fixer leurs prix et les commercialiser. Crystèle vend dans sa boutique à la ferme, sur les marchés, à des créateurs et via son site internet. « Au départ, en plus des frais de transformation, il faut financer le stock alors que les ventes en face sont faibles, d’autant qu’elles sont concentrées sur octobre, novembre et décembre », explique-t-elle.
Soyons fiers de notre métier, montrons aux jeunes qu’on peut y arriver !
Pour Mathis, le principal frein à l’installation n’a pas été le manque de données ou les investissements, mais plutôt la recherche de foncier qui, vu les prix et la rareté, a duré deux ans. Après son bac pro CGEA, il a été aide familial puis salarié sur l’exploitation familiale. En attendant de la rejoindre d’ici quelques années, il a préféré faire ses armes sur une petite structure, et son expérience à lui, plus librement en étant seul. Il a donc repris 58 ha à un cédant qu’il connaissait par bouche-à-oreille, 34 ha en location et 22 ha à l’achat, tout en restant employé à mi-temps sur la ferme de son père et sa tante, et en travaillant avec eux pour différents chantiers.
Le jeune agriculteur n’a pas demandé la DJA. « Trop de contraintes, justifie-t-il. Et comment établir un prévisionnel sur cinq ans avec si peu de visibilité sur les prix et les marchés et autant de volatilité ? », s’interroge-t-il. Lui comme Crystèle ont perçu une certaine morosité dans le concours, les messages des candidats, quelle que soit la filière, à l’image de ce qu’a ressenti l’organisatrice qui en parlait au moment des résultats. « Tout n’est pas tout beau tout rose mais il faut positiver. »
« Être agriculteur n’est pas simple, mais soyons fiers de notre métier, donnons une bonne image de l’agriculture, montrons aux jeunes qu’on peut y arriver car si on n’essaie pas de faire évoluer la situation, on tourne en rond », exhorte Mister agri 2026. Il va profiter de son élection pour être davantage présent et actif sur les réseaux sociaux. Miss Agri est une habituée pour créer de la proximité avec ses clients, grâce à des storytellings. Elle accueille également le public sur sa ferme. Depuis qu’elle a été élue, cette proximité est encore renforcée. « Autant de bienveillance que dans les nombreux soutiens reçus » depuis leurs inscriptions respectives.
Retrouvez Crystèle et Mathis en vidéo :
« Je suis la preuve vivante qu’à 24 ans, on peut se lancer dans une filière atypique, seule, en étant une femme, lance la jeune installée. Si j’étais ministre de l’agriculture, la première mesure que je mettrais en place serait un fonds de garantie pour les jeunes agriculteurs, surtout dans les productions un peu plus rares, pour leur assurer de la trésorerie la première année d’installation qui est très difficile. » Face à l’accord UE/Mercosur qui devient chaque jour plus tangible, elle suggère de se différencier, notamment grâce aux labels qualité, pour garantir l’origine française des produits.
Ministre de l’agriculture, Mathis, lui, instaurerait « une TVA à 0 % pour tout ce qui est produit et transformé en France ». Pour « se préparer à l’arrivée » de l’accord de libre-échange avec le Mercosur, il propose la mise en place de clauses miroirs pour que soient appliquées aux importations les mêmes normes que celles imposées dans l’Union européenne. Il appelle, par ailleurs, à « soutenir les filières locales et innovantes ».
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