Belgique : le royaume de la frite
[Contenu proposé par La Pomme de terre française] En Belgique, au moins 85 % des 3,5 à 4,5 Mt de pommes de terre produites chaque année sont destinées à un site de transformation. C’est dire le poids de l’industrie dans ce pays.
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« Même si les capacités de transformation des usines belges croissent désormais un peu moins vite, 6,2 Mt de pommes de terre ont tout de même été travaillées par les industriels en 2023, contre 1,6 Mt en 2001. Et chaque année, ça augmente. Moins vite que par le passé, mais ça augmente toujours ! » Tel est le constat que dresse Pierre Lebrun, directeur de la Fiwap, l’organisme interprofessionnel qui rassemble le plant, la consommation, le négoce, l’industrie et la recherche sur la partie wallonne de la Belgique.
Pour lui, les usines ne sont pas saturées. Les surfaces plantées ont d’ailleurs encore augmenté de 6,4 % en Belgique en 2024 par rapport à 2023, de 7,2 % dans la zone NEPG selon les derniers chiffres de décembre 2024. La Belgique frôle même les 100 000 ha de pommes de terre de conservation, 99 560 ha précisément, contre 60 000 en 2001.
Plus de place en Belgique
Malgré cette hausse des surfaces, la récolte 2024 stagne à 4,26 Mt (- 1 %), alors qu’elle progresse de 6,9 % sur la zone NEPG, à 24,56 Mt, tirée par l’Allemagne (+ 8,9 %) et surtout la France (+ 12,2 %).
« Agronomiquement, il n’y a pourtant plus de place en Belgique. Le territoire doit être considéré comme saturé si une rotation idéale de minimum cinq ans veut être respectée. Or, elle est le plus souvent de quatre, parfois moins. La Fiwap milite pour que les trois ans minimum inscrits dans la loi soient respectés, mais les prix en betteraves, annoncés inférieurs à ceux de l’an passé, et la forte variabilité du cours des céréales ne nous aident pas. »
La pomme de terre, depuis 2022, a globalement bien payé, mais certains producteurs ont toutefois connu des situations très difficiles. Les conditions climatiques n’ont en effet pas été faciles. Les pluies abondantes de 2023 ont contraint de laisser en terre en fin d’année 8 % des surfaces. Pour 2024, les plantations ont été retardées de plus d’un mois. À l’automne, alors que 30 à 70 mm étaient tombés en deux jours mi-octobre, à la fin du mois de novembre, tout était finalement arraché, mais les agriculteurs ont dû forcer, abîmant les sols.
« Malgré ces difficultés, depuis deux ans, ceux qui ont tout récolté et stocké ont bénéficié de prix élevés, supérieurs à 400 €/t à partir de la semaine 19, en mai, et jusqu’à 500 €/t pour la variété Fontane. En conséquence, les locations de terre, en Belgique ou en France, et les investissements en bâtiments de stockage sont nombreux. La maîtrise des coûts de production reste toutefois un enjeu majeur. La main-d’œuvre, la location des terres, le plant, les intrants et l’énergie pèsent davantage d’année en année dans les comptes d’exploitation. »
Des variétés sensibles au mildiou
Fontane, Innovator, Challenger, Markies et Bintje couvrent 90 % des surfaces belges. À elle seule, Fontane en représente 55 %. « Toutes ces variétés sont sensibles au mildiou, constate Pierre Lebrun. Le risque de résistance à certaines matières actives est désormais avéré. De plus, ce manque de diversité variétale conduit à la baisse progressive des rendements et à l’émergence de ravageurs. Il nous faut changer de cap, c’est une évidence ! Or, même si la protection phytosanitaire coûte cher, tant financièrement qu’environnementalement, les industriels continuent de mettre le rendement de transformation et la qualité technologique (couleur, longueur…) comme premiers critères de choix variétal. Progressivement, cela commence à bouger. Les enjeux écologiques font réfléchir la filière. »
La Fiwap, les instituts de recherche, les maisons de plants sont de fait à la recherche de variétés plus robustes. Trois variétés belges sont actuellement inscrites au catalogue. « Mais rien n’est simple. Louisa, par exemple, une variété chips, a connu un certain succès, mais sa résistance mildiou n’a malheureusement pas tenu. »
La Belgique est par ailleurs très dépendante de l’importation de plants (314 000 t importées en 2023). Elle a cependant connu un rebond de production entre 2023 et 2024, passant de 2 000 ha à 2 500 ha. « Ces hectares de plants supplémentaires sont très probablement des variétés industrielles… avec sans doute en parallèle un développement de plant fermier, pratique strictement réglementée par l’AFSCA, l’Agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire. » Lors de la signature, le 24 novembre sur Interpom, de la nouvelle version du Code de bonnes pratiques (voir encadré), Christophe Vermeulen (Belgapom) et Jean-Pierre Van Puymbrouck (FWA) ont d’ailleurs souligné cette dépendance et plaidé en faveur de la promotion des plants belges et de leur souhait d’en faire une priorité pour Belpotato.be.
Pierre Lebrun n’oublie pas non plus le rôle du négoce, acteur très important en volume. « Il permet de fédérer la production, apporte une dynamique en choix variétal, et contribue au développement de la filière belge de la pomme de terre. »
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