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Le classement d’une terre agricole en zone urbaine peut remettre en question le bail rural

Lorsqu'une parcelle agricole est reclassée en zone urbaine, la résiliation du bail n'est possible par le bailleur que s'il présente un projet réel de construction.

Lorsqu'une parcelle agricole est reclassée en zone urbaine, le bailleur (propriétaire) peut demander la résiliation du bail rural pour en changer la destination. Cette possibilité, encadrée par la loi, suppose un projet réel et impose des démarches strictes.

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L’article L.411-32 du Code rural et de la pêche maritime permet au bailleur de mettre fin à un bail rural lorsque les parcelles louées sont classées en zone urbaine, dans le but d’en changer la destination agricole. Pour cela, il doit informer l’agriculteur preneur du bail par acte extrajudiciaire, en s'engageant à modifier réellement la destination agricole des parcelles dans un délai de trois ans, puis l’indemniser conformément aux règles prévues par la loi. 

De ce fait, le reclassement de parcelles agricoles en zone urbaine constitue un tournant majeur dans la relation contractuelle entre bailleur et preneur. S’il ne provoque pas automatiquement la rupture du bail, le reclassement peut néanmoins profondément affecter sa pérennité et conduire à sa résiliation partielle ou totale selon les projets du bailleur. 

Qu’est-ce que le changement de destination agricole de parcelles ? 

Le changement de destination agricole désigne la possibilité effective de transformer l’usage du sol loué pour le soustraire à son affectation agricole, généralement en vue d’un projet de construction. 

Ce changement peut justifier, sous certaines conditions, la résiliation du bail rural par le bailleur, conformément à l’article L.411-32 du Code rural et de la pêche maritime. Mais attention, le simple classement en zone urbaine ne suffit pas. Le bailleur doit non seulement exprimer clairement son intention de mettre fin à l’activité agricole sur le terrain, mais aussi être en mesure de réaliser effectivement le projet dans un délai de trois ans.

Concrètement, changer la destination agricole signifie par exemple transformer des terres cultivées en terrain à bâtir pour y construire des logements, des commerces ou des équipements publics. Ce changement d’usage marque un passage définitif d’une vocation agricole à une vocation non agricole.

Résiliation du bail rural d'une parcelle reclassée en zone urbaine (U)

Lorsqu’une parcelle agricole louée est classée en zone urbaine (U) dans un document d’urbanisme, le bailleur peut engager une procédure de résiliation du bail rural. Toutefois, ce classement ne suffit pas à lui seul, il doit être accompagné d’un projet réel et concret du bailleur visant à changer la destination agricole de la parcelle. 

En effet, le classement en zone U n’équivaut pas à un changement automatique d’usage et de destination d’un bien (parcelle ou bâtiment). Il offre simplement une possibilité réglementaire. Tant qu’aucun projet n’est initié par le bailleur (construction, aménagement, etc.), la terre peut continuer à être exploitée par le preneur. Ce n’est qu’à partir du moment où le bailleur souhaite modifier l’affectation agricole du sol que la résiliation devient envisageable. C’est par exemple le cas pour le bailleur qui souhaite modifier la destination agricole d’une parcelle afin d’y construire un lotissement d’habitations. 

Une autorisation du préfet indispensable hors zone U

Pour les parcelles situées en zones agricoles (A), naturelles (N), ou même en l’absence de document d’urbanisme, la règle est plus stricte : le bailleur doit obtenir une autorisation préalable du préfet de département avant de pouvoir résilier le bail. Cette autorisation est obligatoire, quel que soit le projet envisagé. À noter que même si la zone AU est destinée à être urbanisée à terme, elle ne bénéficie pas du régime dérogatoire de la zone U : sans feu vert du préfet, aucune résiliation n’est recevable.

La reprise des parcelles par le bailleur

Que le terrain soit situé en zone U ou qu’une autorisation préfectorale soit requise, la procédure de résiliation impose au bailleur de notifier formellement sa décision au preneur. Cette notification prend la forme d’un acte extrajudiciaire, c’est-à-dire un document officiel remis par un commissaire de justice (anciennement huissier de justice).

Cet acte doit contenir l’engagement du bailleur de changer ou de faire changer la destination agricole des parcelles concernées dans les 3 ans qui suivent la résiliation. 

Une résiliation partielle ou totale du bail rural

En principe, la résiliation porte uniquement sur les parcelles dont le bailleur projette de modifier leur destination agricole. Il peut donc s’agir d’une résiliation portant sur une partie seulement ou sur la totalité des biens loués. 

Toutefois, en cas de résiliation partielle qui compromettrait gravement l’équilibre économique de  son exploitation agricole, le preneur peut demander que le bail soit résilié dans son intégralité. 

L’indemnisation du preneur évincé 

Afin de compenser le préjudice subi suite à la perte de la jouissance des terres, l’agriculteur preneur du bail rural est en droit de percevoir une indemnité d'éviction. Elle couvre la perte de revenus, les améliorations apportées (clôtures, plantations…) et les frais de réinstallation.

Le montant est fixé à l’amiable ou, en cas de désaccord, par le tribunal paritaire. Le preneur peut la réclamer auprès du bailleur ou saisir le tribunal, et demander une avance en urgence via une procédure en référé.

Le preneur ne peut être obligé de libérer les lieux avant l’issue de l’année culturale en cours au moment du paiement de l’indemnité d’éviction, qu’il s’agisse de l’indemnité définitive convenue entre les parties ou, à défaut, d’une indemnité provisionnelle fixée par le président du tribunal paritaire en référé (procédure d’urgence).

Pour éviter toute procédure judiciaire ou situation de blocage, le bailleur et le preneur peuvent se concerter en amont de la procédure et, chacun de leur côté, se faire accompagner par un avocat spécialisé en droit rural afin de sécuriser juridiquement l’opération et défendre au mieux leurs intérêts respectifs.

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