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Agriculture biologique Difficile de gérer l’apport d’azote

Comment mieux maîtriser l’apport d’azote sur les grandes cultures biologiques ? C’est une des questions que se sont posés les participants à la journée technique organisée par Arvalis et l’Itab lundi à Paris. La grande variabilité de la composition mais aussi de la minéralisation des matières organiques compliquent en effet la tâche des agriculteurs qui auraient besoin d’outils adaptés. Morceaux choisis.

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Près de 10.000 hectares d'orge sont cultivés. (© DR)
« C’est toujours difficile d’avoir un langage simple et des prédictions fiables. Nous avons déjà progressé sur la prise de conscience de la variabilité de la disponibilité de l’azote et de la minéralisation, ainsi que sur la dynamique de mise à disposition, mais il reste beaucoup de travail à faire », souligne Eric Justes, de l’Inra Agir Toulouse, qui a animé les débats dédiés à cette cruciale problématique.

Les « Pro » mal caractérisés, Rsh déterminant

Le premier exposé évoquait notamment la difficulté d’estimer précisément la valeur fertilisante des produits résiduaires organiques, dits « Pro », c’est-à-dire les composts de fumiers, de déchets verts, les vinasses, les fientes ou encore les boues urbaines. « La proportion d’azote comme ses formes organiques diffèrent largement entre les Pro et même au sein d’une même filière de production, en relation avec leur origine, leur nature, les procédés de traitement et de stockage, indique Alain Bouthier, d’Arvalis-Institut du végétal. Il est donc nécessaire de mieux caractériser ces produits, mais aussi de mieux connaître les dynamiques de minéralisation et les effets à long terme des apports de Pro, mais aussi les conditions de compostage puisque les techniques utilisées à la ferme ou sur les plateformes industrielles ne sont pas les mêmes. On a aussi besoin d’acquérir des références régionales car les effets varient selon les conditions climatiques et les sols. »

En plus d’être plus variables et complexes que les engrais minéraux, les engrais organiques (Pro dont la teneur en azote total est supérieure à 3% de leur matière sèche) coûtent de plus en plus chers. « C’est pourquoi je conseille aux agriculteurs bio de relever le Rsh (reliquat sortie hiver) car s’il est élevé, ils peuvent réduire, voire se passer d’engrais organiques, souligne Blaise Leclerc, de l’Itab. En cultures conventionnelles, les exploitants le font systématiquement pour mieux doser leurs apports. C’est dommage de s’en passer en bio car le coût de l’analyse est beaucoup moins élevé que celui des engrais donc on s’y retrouve. »

Un premier outil pour le blé tendre


Avec un peu plus de 29.000 hectares, le blé arrive
en tête des grandes cultures biologiques. (© Terre-net Média)
Cette importance du Rsh a aussi été soulevée par la Chambre d’agriculture de Seine-et-Marne qui, avec l’Itab, a développé un outil de gestion de l’azote pour le blé tendre à partir de 58 essais réalisés dans le Centre et en Ile-de-France avec de la farine de plume, de la vinasse, des fientes et des engrais Derome. « Nous avons d’abord constaté que les engrais organiques sont souvent apportés de façon systématique, sans connaissance de leur efficacité alors qu’ils coûtent de plus en plus chers et que leur disponibilité diminue, a résumé Lise Billy, de la Chambre d’agriculture 77. Notre étude a ensuite mis en évidence l’impact du type de sol, du Rsh et des facteurs limitants (climat, mauvaises herbes, peuplement, maladies et ravageurs) sur leur efficacité. Dans 70 % des cas, ils ne sont pas rentables car les gains en rendement (en moyenne 6 quintaux/hectare) et en taux de protéines ne compensent pas le coût des engrais (1,5€/Unité) et de l’épandage. C’est pourquoi nous avons mis au point un outil calculant le rendement potentiel de chaque parcelle, à partir de la quantité d’azote absorbé et du coefficient de besoin en azote, pour aider au choix de fertiliser ou non.»

Un premier outil intéressant mais encore perfectible puisqu’il ne différencie par exemple pas les quatre types d’engrais utilisés, et qu'il nécessiterait d'être testé sur un plus grand nombre d’essais avec notamment des situations pédoclimatiques différentes.

Quelles perspectives ?

« L’avenir des grandes cultures bio va passer par la mise en œuvre de plusieurs leviers : l’optimisation de la succession des cultures (avec notamment l’utilisation de légumineuses), la meilleure connaissance et utilisation des engrais verts, mais aussi le complément par des engrais organiques, estime Eric Justes de l’Inra Agir Toulouse. Il y a de grosses marges de progrès, mais il faut investir en terme de recherche. »

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