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Agronomie Comment l’agriculture de conservation augmente l’efficience de l’eau

La couverture permanente des sols joue un double rôle sur l’efficience de l’eau, permettant à la fois de réduire l’évaporation et le ruissellement.

Des sols vivants et toujours couverts permettent une meilleure infiltration, un meilleur stockage et une moindre évaporation de l’eau. L’agriculture de conservation des sols augmente significativement l’efficience de l’eau, ont mis en avant les organisateurs et invités d’une récente journée sur ce thème à La Pommeraye (Mauges-sur-Loire, Maine-et-Loire).

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Quand il explique ses pratiques, Damien Epoudry aime bien utiliser la métaphore du chauve, plus fragile face au soleil l’été que la tête chevelue. Ses terres, à Liré (Maine-et-Loire), sont chevelues. Il les couvre toute l’année depuis qu’il pratique l’agriculture de conservation des sols (ACS). « Mes couverts favorisent l’infiltration, l’eau suit les galeries des vers de terre et des racines ».

Tout laisse penser que les systèmes en ACS sont plus résilients que les systèmes travaillés face aux épisodes de sécheresse : meilleure infiltration et alimentation des plantes, meilleure prospection racinaire et meilleure connexion de la porosité. « Ce que l’on sait pour l’instant, c’est que l’on gagne à minima 14 ou 15 millimètres d’eau de taille de réservoir utilisable, cela représente donc deux jours d’évapotranspiration de gagnés, c’est déjà pas mal » observe Lionel Alletto, directeur de recherche en agronomie à l’Inrae de Toulouse.

De l’importance d’avoir des sols vivants

Sur son exploitation d’Andard (Loire-Authion) près d’Angers, Jean-Michel Diard a bien constaté cette résilience. Avec le groupe 30 000 auquel il participe, il a mesuré ses besoins d’irrigation avec des sondes capacitives. Le premier tour d’eau a pu commencer dix jours après les voisins, autour du 10 juillet. « Dans le temps quand on labourait, on retournait du sable blanc. Aujourd’hui, après quinze ans d’ACS, il y a de la terre brune sur 4-5 cm de profondeur ».

Un sol vivant permet de limiter le ruissellement. Les vers de terre construisent des canaux, les micro-organismes fabriquent de la porosité pour que l’eau s’y stocke et permettent aux racines d’aller se développer. « Sur un sol limoneux, avec 10 centimètres d’enracinement gagnés en profondeur, on gagne 25 millimètres d’eau par centimètre de sol, soit un tour d’eau », met en avant Marie-Line Faure. Dans les sols labourés, à l’inverse, les semelles de compaction constituent une barrière à l’enracinement.

Le double effet de la couverture des sols sur l’efficience de l’eau

La couverture permanente des sols joue aussi un rôle fondamental sur l’efficience de l’eau et même un double rôle, puisqu’elle permet à la fois de réduire l’évaporation et le ruissellement.

Pour l’évaporation, la baisse est de 30 % par rapport à un sol nu pour un couvert de 8 tonnes de matière sèche (TMS) et de 15 % pour un couvert de 3 TMS. Dans un contexte de sécheresse, c’est précieux.

Les sols couverts ont une température bien inférieure aux sols nus, en plein été, ce qui contribue grandement à améliorer l’efficience de l’eau. Le GIEE Magellan, dans la Nièvre a réalisé des mesures de températures à la surface du sol en plein mois d’août. À 11h30, l’écart entre sol couvert et sol nu est de 7,7°C. À 15h, il est de plus de 15°C.

Le couvert permet aussi d’augmenter l’infiltration de l’eau, grâce à une structuration du sol en surface. Il contribue à réduire le ruissellement. L’eau qui pénètre dans le sol est capitalisée dans la mésoporosité, cette porosité très fine fabriquée par les champignons, qui permet de maintenir l’eau. « Dès 2TMS de résidus, l’infiltration est deux fois supérieure à un sol nu, le ruissellement est réduit de 60% » met en avant Marie-Line Faure, animatrice d’un groupe 30 000 ACS en Maine-et-Loire.

Et puis le couvert, une fois restitué, apporte de la matière organique, ce qui contribue à la structuration du sol. « Grâce à un effet mulch, un couvert détruit permet d’augmenter l’efficience de l’eau de 20 % » rapporte l’ingénieure de la chambre d’agriculture des Pays de la Loire. L’efficience de l’eau correspond au rendement de la plante en fonction d’une quantité d’eau apportée.

Des couverts qui transpirent

Un autre effet induit des couverts est leur transpiration. L’eau évapo-transpirée par les plantes retombe localement sous forme de pluie, c’est ce que l’on appelle le « petit cycle de l’eau », qui se différencie du « grand cycle (à l’échelle planétaire, lui) par un fort transfert vertical. Autrement dit, couvrir les sols favorise le petit cycle de l’eau pour maintenir un microclimat à l’échelle d’un bassin versant ou une région, et contribuer à un rafraichissement local des températures. Et « toute l’eau qui est transpirée, c’est une eau qui n’est pas ruisselée, qui ne s’échappe pas vers les océans » glisse Marie-Line Faure.

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