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Engrais et compensation carbone : « on va à la catastrophe », déplore l’AGPB

Le mécanisme de compensation carbone aux frontières risque de peser trop lourdement sur les importations d'engrais, dénonce l'AGPB.

Arrêt des importations d’engrais, surcoûts ingérables pour les céréaliers et déprise agricole, tels seraient les conséquences de l’application au 1er janvier 2026 du mécanisme de compensation carbone aux frontières. Les engrais azotés produits en dehors de l’UE, dont la fabrication est très énergivore, seraient ainsi lourdement taxés, or aujourd’hui 43 % des volumes utilisés en France proviennent de pays tiers.

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Instrument réglementaire européen, le Mécanisme d’ajustement Carbone aux frontières (MACF, ou CBAM en anglais) a pour objectif de limiter les fuites de carbone, en soumettant les produits importés dans l’Union Européenne à une tarification du carbone équivalente à celle appliquée aux industriels européens fabriquant ces produits. Le dispositif doit entrer en vigueur au 1er janvier 2026.

Or « structurellement, nous sommes importateurs d’engrais », explique Cédric Benoit, céréalier dans le Loiret et secrétaire général adjoint de l’AGPB. Notamment en ce qui concerne l’urée et la solution azotée, qui représentent 43 % de la consommation française d’engrais et dont la production se fait quasiment exclusivement hors UE, détaille-t-il.

Un prix inabordable pour les agriculteurs

D’après la calculatrice mise en place par le ministère de la transition écologique, le surcoût par tonne d’urée importée serait de 121 €. Pour la solution azotée, il serait de 144 €/t. Or ce coût supplémentaire ne peut pas être absorbé par les producteurs de grandes cultures qui aujourd’hui font face à un contexte économique particulièrement dégradé.

« Nous subissons trois années consécutives avec des revenus négatifs, ce n’était jamais arrivé dans l’histoire de l’agriculture française », rappelle Cédric Benoit. En cause, des charges qui ont explosé et ne sont jamais revenues au niveau de 2019, avant le Covid. « Le poste engrais est passé largement en tête des postes de charges variables », représentant aujourd’hui 65 % des charges soit plus de 150 € par hectare sur une exploitation moyenne, explique-t-il. Le risque, si les agriculteurs ne peuvent plus acheter d’engrais, c’est d’aller vers une perte de compétitivité, voire l’arrêt de la production céréalière et la déprise agricole, en particulier dans les zones intermédiaires.

Des importations potentiellement à l’arrêt

« Depuis un an, les importateurs nous alertent et risquent aujourd’hui d’arrêter d’importer », explique l’AGPB. Avec les surcoûts actuellement estimés, les contrats pour janvier ne se signent pas, indique l’organisation. « C’est un marché de masse, avec des marges unitaires faibles, sur de gros volumes », rappelle Sylvain Lhermitte, responsable Europe et Filières à l’AGPB. On parle ainsi de 5 € de marge par tonne, quand les taxes évoquées atteindraient 40 à 50 € la tonne.

Dans ce contexte, l’AGPB demande donc soit la suspension du MACF, qui ne peut s’appliquer en l’état en 2026, soit une compensation. Sur ce sujet, « on a l’impression de ne pas être très écoutés, alors qu’on peut aller à la catastrophe… », alerte Cédric Benoit.

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