Fortes températures dès le mois de juin : quels risques pour le tournesol ?
La France a connu une vague de chaleur survenue tôt dans la saison. Dès la mi-juin et jusqu’aux 1er jours de juillet, les cultures ont été exposées à des températures maximales ayant régulièrement dépassé les 35 degrés, souvent combinées à des précipitations insuffisantes.
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Après un début de campagne particulièrement bien accompagné par une offre climatique clémente, le tournesol a dû faire face à un changement brutal de contexte météorologique alors que les plantes n’avaient pas encore atteint la floraison ou qu’elles l’atteignaient à peine dans les secteurs méridionaux.
Le stress thermique exacerbe les effets du stress hydrique
Premier effet redouté des fortes températures, elles contribuent à l’augmentation de l'évapotranspiration, et à l’assèchement du sol. Lorsqu’elles connaissent une situation de déficit hydrique, les plantes ferment leurs stomates, ce qui limite les échanges gazeux, la photosynthèse, ainsi que la production de biomasse. La phase de sensibilité maximale du tournesol au stress hydrique correspond à la floraison.
Cependant, on n'observe pas, comme chez le maïs par exemple, un effondrement des rendements. Il existe plutôt un effet modéré s'étalant sur une longue période. Ainsi, une contrainte exercée avant ou après floraison conduit également à une réduction du rendement, mais dans de moindres proportions (voir graphique ci-dessous).
Le stress thermique préjudiciable surtout durant la floraison
Les effets du stress hydrique dépendent fortement du stade de développement du tournesol. Jusqu’au début de la floraison, un manque d’eau peut limiter la croissance foliaire, réduisant le potentiel photosynthétique. Pendant la floraison, un stress hydrique sévère (satisfaction en eau autour de 40 %) perturbe la nouaison (formation des graines) et peut amener à la réduction du nombre de graines, jusqu’à -30 % - 40%.
En revanche, si le stress reste modéré (satisfaction en eau au-delà de 70 % des besoins de la plante), le nombre de graines n’est pas affecté. Enfin, de début floraison à maturité, le stress hydrique peut affecter le remplissage des akènes, altérant le potentiel de rendement de façon proportionnelle à la durée du stress.
Les impacts directs du stress thermique sont moins documentés que ceux du stress hydrique. Il est toutefois admis que les températures élevées impactent directement la physiologie du tournesol, avec des effets majeurs en période de floraison. Ainsi des températures supérieures à 33 - 35°C peuvent altérer la quantité de pollen produit, la fertilité des fleurs, par conséquent perturber la fécondation et provoquer des avortements de grains. Cela peut générer une augmentation du nombre d’akènes vides, avec une proportion corrélée à l’intensité et la durée du stress thermique, tous les fleurons ne s’ouvrant pas en même temps.
Les fortes températures agissent également sur l’activité des abeilles. Au-delà de 35°C, leur activité diminue fortement. Cependant, cet effet semble limité sur le rendement du tournesol, car les abeilles restent actives le matin, lorsque les températures sont encore relativement fraîches, et quelques visites suffisent à assurer la part de fécondation entomophile nécessaire.
Après la floraison, la poursuite des fortes chaleurs va accélérer la sénescence foliaire, réduire la surface photosynthétique active et écourter la phase de remplissage des grains. Moins de feuilles fonctionnelles signifie moins d'énergie produite pour alimenter la formation et le remplissage des graines, avec un impact direct sur le rendement ainsi que sur la teneur en huile.
Quel impact de cet épisode de chaleur précoce sur la production de tournesol ?
En résumé, la combinaison de fortes températures et de déficits hydriques marqués réduit l'efficacité photosynthétique, impacte la fertilité des fleurs et limite la formation des graines, particulièrement autour de la floraison et au moment du remplissage des akènes, deux phases clés pour le rendement du tournesol.
À ce stade, il est encore trop tôt pour estimer les pertes en rendement, et encore davantage pour évaluer les effets sur la qualité des graines, car cela dépendra fortement de l’évolution des conditions climatiques dans les semaines à venir.
Pour les tournesols ayant subi cette 1ère vague de chaleur avant floraison, les impacts devraient rester limités, hormis pour les parcelles semées tardivement et sur sols superficiels, sur lesquelles la surface foliaire des plantes pourra être limitante. Pour les tournesols soumis aux fortes températures en pleine floraison, on peut craindre une réduction du nombre d’akènes, surtout en cas de stress marqué (hydrique et/ou thermique). Toutefois, il faudra attendre le début de la maturité pour observer les capitules et évaluer le taux de fécondation des graines.
Selon l’intensité des stress rencontrés et le stade précis des cultures, tous les scénarios restent possibles : d’une absence d’impact significatif à des pertes localisées pouvant être importantes, surtout en l’absence de précipitations au cours des prochaines semaines. Le régime de pluie de juillet sera par conséquent décisif.
Auteurs : Hélène Tribouillois et Matthieu Abella, Terres Inovia.
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