![]() Taches sur feuilles de blé d’hiver dues à S. tritici (© Basf Agro) |
Incidence économique
On a constaté que S. tritici colonisait toutes les régions. En France, S. tritici est la maladie la plus courante et la plus préjudiciable au rendement. Une atteinte forte et précoce peut provoquer des chutes de rendement allant jusqu'à 50 %. L'agent pathogène s'établit surtout sur les feuilles; on ne constate guère d'atteinte des glumes. Les pertes de rendement sont dues à la perte de tissu assimilateur et au déplacement du flux nutritif source-puits. Les assimilats et les composantes azotées sont retenus dans les feuilles ce qui affecte finalement le poids de mille grains.Contamination, propagation et conservation
![]() Premières atteintes sur la pointe des feuilles au printemps (© Basf Agro) |
L'agent pathogène survit pendant plusieurs mois sur les résidus de récolte restés au sol. Il meurt rapidement après enfouissement des débris. La reproduction peut se faire par deux voies. Par voie asexuée qui produit les pycnospores; celles-ci sont projetées par les éclaboussures de pluie sur les plantes saines qu'elles contaminent. Ou par voie sexuée: les précipitations de la fin de l'été font éclore sur les débris de récolte les pseudothèces qui libèrent à partir de début octobre les ascospores; celles-ci sont dispersées par le vent et peuvent infester encore à l'automne ou en hiver les jeunes semis de blé. Pour la sporulation sur les résidus de récolte, il faut une forte humidité prolongée. Durant l'automne, le nombre des ascospores augmente continuellement. Leur quantité reste élevée pendant l'hiver; elle décroît sensiblement au printemps. La diffusion des ascospores par le vent peut provoquer des primo-infections dans les jeunes cultures de céréales situées à des distances importantes.
L'épidémie est provoquée par la multiplication asexuée: la formation des pycnides. Ce sont de petits corps globuleux dont la couleur fonce suivant leur stade de maturité. Les pycnospores s'échappent des pycnides sous forme de tortillons gélifiés, de couleur blanchâtre (les cirrhes). Leur dissémination dépend de l'humidité qu'elles rencontrent (pluie ou rosée). Les facteurs favorables à la formation des spores, leur sortie des pycnides, leur dissémination, le déroulement de l'infection et la formation des nécroses sont: des précipitations importantes, suivies d'une humidité stagnante sur les feuilles durant un laps de temps assez long, avec des températures optimales entre 15° et 25° C. Même dans ces conditions, il faut au champignon au moins 20 heures pour passer au stade infectieux. Il y a grand danger d'épidémie si ces conditions thermiques sont atteintes avec une présence concomitante d'humidité sur les feuilles durant 35 heures, suivies de 48 heures d'un taux d'hygrométrie de l'air de plus de 90 %. Les éclaboussures de pluie projettent les pycnospores latéralement sur le même étage foliaire d'autres plantes, ou verticalement sur les étages supérieurs de la même plante. L'agent pathogène est très virulent même à de basses températures, et un hiver doux lui permet tout à fait de se répandre. En Europe centrale, le temps de latence est d'environ quatre semaines; il faut donc compter quatre semaines entre l'attaque par le champignon et la manifestation de nouveaux symptômes. Par conséquent, S. tritici pose un problème pour les espèces de céréales dont la croissance en conditions tempérées est lente, mais continue. Les différentes variétés de blé montrent des réactions très variables face à S. tritici (densité des pycnides, dimensions des nécroses).
![]() S. tritici sur feuille de blé : les pycnides ovales, noires, sont typiques (© Basf Agro) |
Diagnostic
Le champignon colonise les feuilles, les tiges et les gaines foliaires. Les taches sur les feuilles sont d'abord vert clair, devenant jaunâtre, ensuite brun; leur forme varie d'un rond irrégulier à l'ovale. Ces taches se fondent finalement les unes dans les autres en formant des nécroses irrégulières, les feuilles meurent et se dessèchent. Les taches formées sur les feuilles par S. tritici font apparaître à l'oeil nu les fructifications noires (pycnides) disposées en lignes. Elles donnent à la nécrose un aspect moucheté. Les premières pycnides se forment déjà dans la feuille jaunissante. Observées sous la loupe, elles apparaissent d'abord brun clair, devenant foncé à noir, avec une auréole noire et des ouvertures claires. Comparées aux pycnides de Septoria nodorum, celles de S. tritici sont un peu plus petites et d'une coloration un peu plus foncée. Leur forme est ovale. En présence d'humidité, elles laissent échapper des cirrhes blancs.
Confusions possibles
On trouve souvent les deux espèces de Septoria simultanément sur les feuilles de blé. S. nodorum infeste souvent les aisselles des feuilles. L'analyse des fructifications (pycnides) fournira l'indice déterminant: les fructifications de S. nodorum sont de couleur miel à rougeâtre brun; celles de S. tritici ont d'abord un cerne noir. Petit à petit, elles se pigmentent totalement en noir. Des nécroses diffuses se présentent également avec Drechslera tritici-repentis. Sous la loupe, les taches brunes montrent des sporanges isolés noirs.
Moyens de lutte
Mesures agricoles préventives :
- Un semis direct réduit considérablement les risques d'infection dus aux résidus de chaumes et de pailles (pycnides, pseudothèces). Il conviendrait cependant de pratiquer ces mesures à un niveau supra-régional pour minimiser les risques de contamination par des ascospores amenées par le vent.
- A l'automne, les semis tardifs limitent le temps d'exposition à une primo-infection par les ascospores.
- L'emploi de variétés moins sensibles contribue à minimiser les risques d'infection.
- Les variétés à pailles courtes sont plus menacées, les éclaboussures infectées ayant une distance moindre à franchir.
Mesures de lutte antifongique :
- Une lutte ciblée contre S. tritici demande une bonne connaissance biologique du champignon (temps de latence de quatre semaines), et une bonne appréhension des conditions climatiques (précipitations, suivies d'humidité stagnante sur les feuilles pendant 48 heures). Les fongicides curatifs modernes agissent encore dans les 15 jours qui suivent la primo- infection, déclenchée par les conditions atmosphériques, alors que les symptômes de l'infection elle-même ne sont pas encore visibles. En admettant que le seuil d'intervention ait été fixé aux étages foliaires F5 / F6, avec une atteinte de 50 % de la culture, c'est le moment du traitement, calculé sur la date présumée de l'attaque, qui déterminera son succès. Des traitements ciblés contre S. tritici peuvent être nécessaires à partir des stades 32/33.
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