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31 % des agriculteurs se revendiquent d’abord « paysans » contre 26 % se réclamant « chefs d’entreprise ». « Cette revendication forte du terme "paysans" s’explique par le fait que les agriculteurs sont encore restés, pour bon nombre d’entre eux, dans un schéma familial préétabli, explique-t-il. C’est le chef de famille qui dirige l’exploitation familiale. »
Ce schéma persiste encore aujourd’hui, selon lui. « Les successions père-fils sont encore légion, alors que dans d’autres professions, le repreneur est choisi pour ses compétences. »
Une ambivalence entretenue par les agriculteurs eux-mêmes
Au regard de certaines caractéristiques, l’agriculteur n’est pas un chef d’entreprise comme les autres. « Aucune autre profession ne contrôle autant l’accès au métier et ne parle “d’installations”, poursuit François Purseigle. Le dispositif d’aides à l’installation est réservé aux jeunes. Or les autres secteurs d’activité ne différencient pas plus les plus jeunes chefs d’entreprise des plus âgés. »
Selon lui, le modèle familial réduit à une fonction de production est par ailleurs entretenu par les agriculteurs eux-mêmes et leurs organisations professionnelles. « Les agriculteurs ont délégué leur activité commerciale aux coopératives, la gestion financière au Crédit agricole, le parc matériel aux Cuma… » Et le sociologue de remarquer aux adhérents de la Saf que, « depuis trois ans, Bruno Le Maire vous défend en vous qualifiant de “paysans” et non pas des entrepreneurs. »
Les nouvelles réalités du métier
Il aura fallu attendre 2005 pour que la Fnsea évoque l’entreprise agricole dans son rapport d’orientation. Bon nombre d’agriculteurs, notamment à la Saf, revendiquent depuis de nombreuses années le statut d’entrepreneur et non plus de simple « paysan ».
Sur le terrain, les mentalités évoluent avec la complexité du métier. « Le métier d’agriculteur est une gestion habile de contraintes de plus en plus nombreuses », souligne quant à lui Bruno Herault, chef du centre d’études et de prospectives au ministère de l’Agriculture. Suivi des marchés, recherche permanente de réduction des coûts, contraintes administratives et environnementales de plus en plus lourdes, diversification des activités avec, notamment la production d’énergies renouvelables : les agriculteurs ne sont plus, depuis longtemps, de simples producteurs de matières premières agricoles.
« Attention à la banalisation »
François Purseigle met cependant en garde les agriculteurs sur une volonté trop forte de leur part d’être reconnus comme des chefs d’entreprise comme ceux d’autres secteurs d’activité. « N’allez pas trop loin dans la recherche de banalisation de votre statut. Car la revendication des spécificités de l’activité agricole vous ont permis d’obtenir différents avantages non négligeables, comme une représentativité professionnelle particulière, et surtout des avantages fiscaux que d’autres secteurs n’ont pas. La banalisation pourrait, à plus ou moins long terme, vous les faire perdre ».