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Le service de la statistique et de le prospective du ministère de l’Agriculture a analysé les données relatives aux pratiques de fertilisation azotée depuis les années 90. L’évolution montre ainsi qu’après une intensification agricole basée sur l’utilisation systématique d’azote des années 60 à la fin des années 80, la progression des apports a marqué un arrêt sensible. Ce retournement précède la réforme de la Pac de 1992, parfois évoquée comme point de rupture des pratiques de fertilisation, conséquence d’une meilleure maîtrise des doses en grandes cultures. Les doses d’azotes relatives sur le blé, c’est-à-dire la quantité d’azote apportée par quintal de blé produit, s’accroissent au cours des années 80 puis régressent à la fin de la décennie. Elles se sont stabilisées alors que les rendements ont continué de progresser.
Les agriculteurs tendent désormais à s’approcher au plus près des besoins des cultures, gagnant ainsi en efficacité et améliorant la teneur en protéines du blé. En 2006, seulement 8 % des surfaces en blé tendre ont reçu des apports déterminés selon une dose "habituelle" empirique, contre 43 % en 1994. Les outils de pilotage, l’observation de la densité des plants, la mesure ou l’estimation des reliquats d’azote dans le sol au sortir de l’hiver et la simple surveillance des parcelles sont des méthodes de plus en plus utilisées.
Ajustement en saison selon le rendement potentiel
L’ajustement en cours de campagne contribue à limiter le surdosage conjoncturel. Il permet de rectifier les doses, notamment lorsque les vicissitudes climatiques font chuter les rendements potentiels. En 2001, alors que les rendements ont été affectés par des inondations, les ajustements ont concerné 62 % des superficies de blé tendre, contre 25 % en 2006. L’année dernière, du fait de la sécheresse printanière, le rendement national moyen du blé tendre s’est replié de 4 q/ha, soit près de 12 kg N/ha risquant d’être entraînés dans les nappes phréatiques. Les livraisons d’azote au printemps 2011 ont reculé de 3 %.
Pour être efficace, l’ajustement de la fumure azotée s’accompagne d’un fractionnement des doses tout au long de la croissance du blé permettant d’adapter les apports aux besoins de la plante à un moment donné. Près de 71 % des surfaces en blé tendre bénéficient en 2006 d’au moins trois apports, alors que seulement 26 % en bénéficiaient en 1994.
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Un contexte de volatilité des prix des engrais et des céréales…
Pour compliquer l’affaire, les agriculteurs doivent s’adapter, en plus, à une volatilité accrue du prix des engrais depuis 2007. Le prix des engrais azotés, fabriqués à partir du gaz naturel, est en effet indirectement lié à celui du pétrole très volatil. Le prix du gaz naturel suit le prix du pétrole, mais peut aussi s’en écarter à court terme en raison de la spécificité de son marché. Par ailleurs, le cours des céréales fluctue fortement, en raison d’une demande inélastique et d’une offre variant considérablement sous l’effet de facteurs climatiques incontrôlables. Non synchronisées, les brutales évolutions des prix des engrais et des céréales peuvent considérablement contracter le revenu agricole, comme en 2009 où les prix agricoles sont retombés pendant la flambée du coût des engrais.
…incitant les agriculteurs à anticiper leurs achats d’engrais
Fortement exposés à cette volatilité, les agriculteurs adaptent leur rythme d’achats d’engrais. Et les prix agricoles au cours d’une campagne conditionnent les livraisons d’engrais au cours de cette même campagne, bien que les cultures ne soient commercialisées que sur la suivante. Ainsi, les agriculteurs anticipent sur la base des prix agricoles au moment de l’épandage. Face aux flambées du coût de l’azote, les agriculteurs gèrent et anticipent leurs achats d’engrais. Ainsi, lors de la campagne 2007/2008, les agriculteurs ont accéléré leurs achats entre octobre 2007 et février 2008, le coût d’achat des engrais étant en pleine progression. Ils ont limité leurs commandes lors du pic de prix en septembre 2008 et ce, jusqu’en mai 2009. La baisse du coût des engrais et la reprise des cours des céréales en 2010 ont accéléré à nouveau le rythme des livraisons.
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