"L'Etat se fout de nous", a lancé Christian Pinaudeau, secrétaire général du syndicat des sylviculteurs du Sud-Ouest, en marge de l'Assemblée générale du syndicat qui a réuni plusieurs centaines de propriétaires forestiers au Barp, près de Bordeaux.
Déjà, la semaine dernière, un "collectif de sylviculteurs sinistrés" s'en était pris directement au président de la République, accusé de se désintéresser de la région Aquitaine, et plus particulièrement du département de la Gironde, le plus touché par la tempête.
"Visiter et s'occuper des zones sinistrées sur votre propre territoire est, il faut en convenir, beaucoup moins agréable et glorifiant que la parade à Johannesburg entre autres, mais c'est votre pays, non"?, écrivait ce collectif dans une lettre ouverte à Jacques Chirac.
"Les sylviculteurs sont exaspérés par la situation", a commenté M. Pinaudeau, rappelant que 200.000 hectares de forêt ont été dévastés en Aquitaine, dont 150.000 en Gironde. Là, et plus précisément dans le Médoc, près de 70% des pins ont été couchés, soit 7,5 millions de mètres cubes sur les 11,4 millions m3 de pins sur pied. 40 à 50% des bois abattus y sont encore à terre, selon le syndicat. Or, aujourd'hui, en Aquitaine, seuls 50.000 ha sur les 200.000 touchés ont été nettoyés. En cause notamment: l'extrême lenteur dans l'attribution des aides promises par le gouvernement pour le nettoyage des parcelles (enlèvement des souches).
Selon le syndicat, il faut environ deux ans à un sylviculteur pour obtenir une subvention nettoyage, étape incontournable avant le reboisement. Sur 5.194 dossiers d'aides déposés en Aquitaine, 2.487 ont été engagés et seuls 1.277 ont été mis en paiement. Aussi les sylviculteurs ont-ils voté vendredi, à l'unanimité, une motion rejetant sur l'Etat la seule responsabilité d'une catastrophe en cas d'incendie.
Dépités, nombre d'entre eux craignent que le plan d'aides mis en place par le précédent gouvernement, d'une durée de 10 ans et d'un montant total de 910 millions d'Euros, aura expiré quand ils seront en mesure de déposer une demande d'aide au reboisement.
Considérant l'accumulation des retards, mais aussi l'avenir global de la filière sylvicole, le président du syndicat des sylviculteurs, Gilles de Chassy, a annoncé qu'il allait demander à Jean-Pierre Raffarin de décentraliser l'ensemble du dossier Forêt/bois, la décentralisation étant un des chevaux de bataille du Premier ministre.
"Eut égard aux conséquences de la tempête, aux extraordinaires lourdeurs procédurales pour acheminer les crédits, les contrôles de toute nature, l'échelon régional ne serait-il pas, sans hésitation, un facteur d'efficacité et de motivation décisifs pour le sylviculteur ?", a demandé M. de Chassy. |