La fréquentation des restaurants de la chaîne par deux victimes de la maladie de Creutzfeldt-Jakob décédées en 2000 et 2001 permet-elle ces poursuites, alors qu'aucun lien direct n'a été établi entre leur maladie et leurs habitudes chez Buffalo Grill ? Depuis les 18 et 19 décembre 2002, dates des mises en examen de Christian Picart, le fondateur, et les dirigeants Nicolas Viguié, Francis Coutre et Daniel Batailler, cette question est centrale aux yeux des avocats, même si l'enquête sur les éventuelles importations frauduleuses de viande anglaise par le groupe est loin d'être terminée. Pour les défenseurs des dirigeants, dont deux ont été placés en détention provisoire pendant plus de trois mois, ces poursuites sont sans fondement. Marquées du sceau infamant de l'"homicide", elles ont en outre mis gravement en danger le groupe et ses quelque 5.000 collaborateurs, victimes d'une baisse drastique de fréquentation, affirment-ils sans relâche. Le parquet général de la Cour d'appel de Paris leur a donné juridiquement raison, lors de l'audience du 24 février où leurs requêtes étaient examinées. Selon lui, il n'est pas possible, "d'établir un lien de causalité entre l'importation frauduleuse de viande britannique" dont est soupçonné Buffalo Grill et "la pathologie mortelle dont furent victimes Laurence Duhamel et Arnaud Eboli". La chambre de l'instruction de la Cour d'appel tranchera lundi. Et, si elle annulait ces poursuites, le groupe devrait s'appuyer sur cette décision pour redorer son blason. Pour autant, l'affaire n'est pas close. Les quatre dirigeants resteront mis en examen pour "mise en danger de la vie d'autrui, tromperie sur la nature, l'origine, la qualité de la marchandise". Christian Picart est également poursuivi pour "complicité de prise illégale d'intérêts", en raison de ses liens présumés avec un vétérinaire soupçonné d'avoir contrôlé avec complaisance Districoupe, la filiale d'approvisionnement du groupe en viande. Par ailleurs, même si l'"affaire Buffalo Grill" était disjointe, c'est-à-dire séparée de l'enquête sur le nouveau variant humain de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ) - comme le souhaite l'avocat des victimes Me François Honnorat - les investigations se poursuivraient. Après avoir concentré leurs recherches sur le siège de Buffalo, Districoupe et ses bouchers, les gendarmes s'intéressent à leurs fournisseurs en France et bientôt à l'étranger. Ils attendent aussi les résultats de plusieurs expertises, notamment sur la comptabilité de Buffalo Grill ou la traçabilité de ses achats de viande. Ils ont également effectué, le 10 avril, des prélèvements dans les canalisations de Districoupe, afin d'y déceler d'éventuelles traces de prion, la protéine responsable de la MCJ, dont la durée de vie peut être très longue. Enfin, une information judiciaire pour "abus de biens sociaux", a été ouverte le 4 février, concernant notamment le paiement éventuel par Buffalo de travaux réalisés à des fins privées. |