Pourquoi les éleveurs français crient au loup

En dix ans, les éleveurs français ont reçu des indemnisations pour 11.146 brebis après des attaques de loup, un chiffre qui parait modeste par rapport à la mortalité naturelle sur l'alpage qui touche chaque année 2 à 5% des troupeaux, soit plusieurs dizaines de milliers de bêtes. Sans parler des attaques de chiens.

"On aurait tort de relativiser l'impact du loup, qui est très durement ressenti par les éleveurs", estime toutefois Florent Favier, porte-parole du programme européen Life pour la gestion du loup.

D'autant que les pertes vont croissant (2.304 indemnisations en 2002 contre 1.830 en 2001 et 1.483 en 2000), traduisant la conquête par le loup de nouveaux territoires. Selon Florent Favier, 5 nouvelles zones ont été colonisées l'an dernier par l'animal.

"Une attaque de loup peut anéantir une vie de travail", témoigne Salim Bacha, animateur de la fédération régionale ovine du Sud-Est.

Le 18 juillet 2002, pas moins de 400 brebis s'étaient précipitées du haut d'une falaise à la suite d'une bête mordue dans le Parc national du Mercantour, déclenchant la commission parlementaire qui a rendu ses conclusions mercredi.

"Le loup suscite un sentiment d'impuissance insupportable pour une profession qui a déjà beaucoup de problèmes", estime Jean-Marc Landry, qui travaille avec les éleveurs depuis 20 ans dans le canton suisse du Valais.

En vingt ans, la moitié des exploitations françaises d'élevage ovin ont disparu et le nombre de brebis mères a diminué de 20%. La production française ne couvre plus que la moitié des besoins, contre 80% au début des années 80.

L'ouverture des marchés, la concurrence des brebis britanniques et néo-zélandaises, la faiblesse des aides européennes rendent de plus en plus difficile la survie du pastoralisme, essentiel au maintien de l'activité et des paysages en montagne.

"Le pastoralisme crie au loup parce qu'il a d'énormes problèmes", résume Jean-Marc Landry. "Mais si le loup disparait, on verra que les problèmes demeurent".

En Suisse, où on compte 3 ou 4 loups, le pastoralisme souffre du même déclin qu'en France. Le tir des loups y est autorisé à partir de 25 brebis tuées en un mois ou 50 dans l'année.

A l'opposé, en Italie, le loup est strictement protégé. Il génére même des revenus touristiques, comme dans le Parc national des Abruzzes. Seul le braconnage régule la population estimée à plus de 500 loups.

Le loup est protégé par la Convention de Berne (1979), qui prévoit toutefois des dérogations, notamment en cas de dommages importants. Le préfet des Alpes Maritimes a ainsi autorisé le tir d'un loup une fois, en décembre 2000, après des attaques répétées d'un troupeau. L'animal, effarouché, ne s'est pas montré.

Les écologistes prônent la prévention: chiens de protection, bergers... Des contraintes jugées insupportables par les éleveurs des Alpes maritimes: parquer les brebis le soir, parfois à des kilomètres du lieu de pâture, les surveiller la nuit au prix d'heures de travail interminables.

"Qu'on nous enlève le loup", lance Salim Bache. "De tous nos problèmes, c'est le pire".

Le ministère de l'Ecologie est au pied du mur: le programme Life, qui permet les aides et les indemnisations, vient à expiration à la fin de l'année.


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