Choisir le vin et l'apprécier n'est plus la prérogative des hommes et les spécialistes du marketing considèrent désormais la femme comme une cible de choix, alors que la production viticole mondiale augmente beaucoup plus vite que la consommation. Dans le monde professionnel, les femmes sommelières, oenologues ou maîtres de chai ont depuis quelques années conquis leur place, même si "c'est parfois difficile, au départ, de se faire respecter dans un univers traditionnellement macho", comme le dit Sophie Jamin-Changeart. Cette jeune oenologue de 28 ans a conquis "de haute lutte" l'estime des ouvriers, tonneliers et vignerons qu'elle côtoie à Gaillac (Tarn). Il y a peu, les femmes étaient interdites dans les chais bordelais, où une croyance voulait qu'une femme indisposée fasse tourner le vin. Depuis, les success story de Corinne Mentzelopoulos à château Margaux ou de Philippine de Rothschild ont fait évoluer la profession. "Quand j'étais jeune, je croyais, parce que c'est ce qu'on m'avait dit, que le vin était une affaire d'homme", se souvient Françoise de Wilde, qui se félicite d'avoir repris en 1976 la propriété familiale, Château Ripeau (Saint-Emilion) quand son frère aîné a refusé de s'en occuper. "Les femmes jouent un rôle important dans la production et la consommation de vin, ce sont elles qui décident et leur rôle doit être reconnu", renchérit Gina Gallo, maître de chai en Californie. Très sensible aux nouvelles tendances du marché, la société Gallo, le plus gros producteur de vins californiens, a choisi cette année, pour sa promotion à Vinexpo, de mettre en avant la blonde petite-fille de son fondateur. Et plutôt qu'une banale dégustation, Gallo a organisé en son honneur un bref "séminaire" autour des femmes et du vin. "Dans un contexte de crise, quand le marché se rétrécit, c'est toute l'industrie qui doit se mobiliser pour trouver de nouveaux créneaux", souligne la direction du groupe américain. Les études le montrent : alors que 70% des consommateurs trouvent difficile de choisir un vin, 80% des choix alimentaires sont faits par les femmes, selon l'agence mba@developpement, qui a mené une étude pour Gallo. Selon cette étude, "les femmes représentent un potentiel essentiel dans les pays où le vin est considéré comme une boisson nouvelle et moderne". Ainsi, au Japon, le vin est avant tout considéré comme une "boisson féminine", par opposition aux whiskies, cognacs ou sakés. Signe de cette évolution, en Grande-Bretagne, les femmes déclarent consommer plus que les hommes, selon une étude de Wine Intelligence dédiée aux modes de consommation outre-manche. Le groupe Tesco, un des plus gros groupes de supermarchés britanniques, ne s'y trompe pas : "En Angleterre, 80% du vin se vend en supermarché et ce sont les femmes qui font les courses", explique Helen Mc Ginn, responsable des achats, qui connaît sur le bout des doigts les exigences de ses clientes : prix, étiquettes lisibles, conseils de concordance culinaire. |