Premier forum mondial des vins et des spiritueux avec 2.500 exposants venus de 47 pays et 48.000 visiteurs, exclusivement professionnels, Vinexpo a rassemblé pendant quatre jours tous ceux qui comptent dans cet univers. Si la France, avec une production annuelle d'environ 60 millions d'hectolitres, reste toujours une référence sur le marché mondial du vin (101,5 milliards d'euros en 2002), ses producteurs sont inquiets d'une stagnation du volume des exportations (+0,6% en 2002). Les professionnels rechignent à parler de crise. Pourtant, le constat est inquiétant : surproduction mondiale - de près de 60 millions d'hl par an -, renchérissement de l'euro face au dollar, climat économique international incertain. Les vins d'appellation d'origine contrôlée (AOC), qui font la notoriété du vignoble français et qui subissent cette déprime générale, exception faite des illustres châteaux, sont également confrontés de plein fouet à la concurrence des vins des pays du Nouveau Monde - Etats-Unis, Australie, Afrique du Sud et Chili. Les consommateurs, souvent désorientés par la diversité des prix et des appellations en France (466 AOC), se tournent volontiers vers ces produits, en général des vins de cépage, offrant un goût constant et renouvelable, ainsi que des prix attractifs. "La France a cru pendant longtemps que la fragmentation de son offre était un atout. Aujourd'hui, l'excès de diversité est un handicap", constate le président de Vinexpo, Jean-Marie Chadronnier, qui prend pour exemple les 12.000 châteaux du Bordelais. Pour ce propriétaire et négociant, une réflexion de fond sur la production française est devenue nécessaire pour s'adapter aux nouvelles donnes : "les vins français, quelle que soit leur catégorie, doivent pouvoir travailler avec des règles identiques à celles de leurs concurrents". La modification des réglementations, selon lui, doit s'appliquer notamment aux vins de cépage. "Le merlot californien ne contient que 85% de merlot et peut recevoir un cépage complémentaire", cite en exemple le président de Vinexpo. "La législation européenne autorise aussi la règle des 85%", ajoute Allan Sichel, le président de l'Union des maisons de Bordeaux, un des deux syndicats de négociants. M. Chadronnier regrette ainsi "l'entêtement" des Français à vouloir appliquer la règle des 100%, "alors que le consommateur ne le sait pas et s'en fiche totalement". Le succès de ce type de vins amène d'ailleurs les professionnels français à réfléchir sur la mise en place de "vins de cépage de France". Très contesté par certains professionnels, qui y voient un reniement des AOC, ce concept a néanmoins reçu un soutien discret du ministre du Commerce extérieur, François Loos, lors de sa visite à Vinexpo. "Sans vendre notre âme au diable, ni nier nos valeurs fondamentales, il faut s'adapter au marché d'aujourd'hui et à sa concurrence. C'est vital", dit M. Chadronnier tout en se voulant rassurant sur l'avenir du secteur viticole français, en raison de son statut de référence. |