Faire du vin "bio": de l'opportunité économique à l'éthique

"La motivation des viticulteurs est parfois d'ordre environnemental et agronomique, mais elle est aussi liée aux aides et au contexte de crise du marché viticole traditionnel qui, en volume, perd 830.000 hectolitres par an en France", avance Thierry Duchenne, le directeur du salon Millésime bio, dont la dixième édition se termine mercredi à Narbonne.

Pour Arnaud L'Epine, installé à Pézénas (Hérault) dans une région frappée de plein fouet par les problèmes de surproduction, considérations économiques et environnementales ont une égale importance. "Si c'était purement philosophique, ça ne suffirait pas", estime-t-il quatre ans après avoir repris la propriété de 19 ha de ses parents. Et de poursuivre: "Pour eux, ça a été un tournant à prendre, même si au début des années 90, ça faisait un peu soixante-huitard, un peu rigolo. Maintenant c'est un fait de société et, en bio, on s'en sort mieux, même si la concurrence est de plus en plus dure".

L'offre, embryonnaire il y a une dizaine d'années, s'est en effet étoffée. En France, le nombre des viticulteurs "bio" atteint 1.150 en 2002 pour une production de 600.000 hl/an. Par souci de "convivialité", les organisateurs de Millésium bio affirment d'ailleurs limiter le nombre d'exposants, fixé cette année à 170 dont une cinquantaine d'Italie et d'Espagne.

Pour certains, la conversion au bio a constitué une opportunité de viser un marché où les prix sont entre 10 et 30% plus chers. Et les primes attribués dans un plan quinquennal (1998-2002) de développement de l'agriculure biologique ont également été incitatives.

Pour autant, le bio n'est pas forcément synonyme de meilleur rendement financier.

"Les écarts de prix reflètent les écarts de coûts de production", avance Thierry Duchenne. Il faut plus de main d'oeuvre pour désherber et, de manière générale, le travail du sol et les traitements sont plus fréquents.

Enfin, les produits de traitements ont un coût plus élevé que les engrais chimiques et les herbicides, pesticides et fongicides de synthèse, totalement proscrits de l'agriculture biologique.

Olivier et Emmanuelle Van Ettinger, basés en Maine-et-Loire, vont même plus loin. "Nous avons décidé de moins gagner d'argent", affirment-ils. "Pour moi, poursuit le premier, le bio est une éthique, une règle de vie, car j'estime que soit on ferme les yeux et on ne voit que l'aspect économique, soit on fait du durable". Sur leur table d'exposants, une affichette annonce "pas de levure, pas de chaptalisation". "Dans des raisins issus de vignes taillées pour un rendement élevé, les levures ont parfois de la peine à tranformer le jus en alcool, d'où l'ajout de levures industrielles", explique Olivier Van Ettinger.

"L'exemple le plus flagrant, ce sont les senteurs de bananes et de fraises dans le Beaujolais nouveau, mais il faut savoir que l'on peut ajouter jusqu'à 60 produits exogènes au cours d'une vinification classique", s'exclame-t-il.

Pour les producteurs "bio", la vinification n'a pas encore de cahier de charges bien précis d'où la mention "vins issus de l'agriculture biologique" et non "vins biologiques".

"C'est pourquoi j'aime autant parler de vin de terroir, cultivé avec une certaine éthique et reflet fidèle d'une terre, que de vin bio", lâche le jeune viticulteur.


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