Les premiers pourparlers menés la semaine passée avaient été ajournés, faute d'avoir suffisamment avancé vers un compromis. La France et l'Allemagne avaient fait à cette occasion des propositions susceptibles d'édulcorer la réforme audacieuse défendue par le commissaire européen à l'Agriculture, Franz Fischler. La volonté semble cette fois unanime d'aboutir rapidement, dans la perspective de la prochaine conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) en septembre à Cancun (Mexique). Mais les discussions s'annoncent encore difficiles. Les divergences persistent sur trois grandes questions: le découplage entre les aides agricoles directes et la production, la dégressivité de ces aides et la réduction des prix de soutien des céréales et des produits laitiers. "Nous avons l'intention d'arriver à un compromis la semaine prochaine car il faut pouvoir lancer cette réforme pour que l'UE, lors de la réunion de Cancun, puisse présenter une position unifiée", a souligné vendredi le ministre grec Giorgios Drys, dont le pays assure jusqu'au 30 juin la présidence des Quinze. "Nous sommes sur la bonne voie", a renchéri Franz Fischler, prédisant toutefois "encore un certain temps" de discussions "ardues". Un noyau dur de pays emmenés par la France, l'Espagne, l'Irlande, l'Autriche et l'Italie a rejeté jeudi dernier un premier compromis, qui ne revenait que timidement sur le découplage total des aides prôné par la Commission européenne et conservait ses projets de dégressivité et de baisses de prix. Le président français Jacques Chirac a réaffirmé vendredi que Paris "n'acceptera pas n'importe quel accord" et refusera "tout risque de payer deux fois, une fois en juin, à l'occasion d'un accord, et une autre fois à Cancun". Dans un souci d'apaisement, les Quinze sont néanmoins tombés d'accord sur le fait qu'"il ne devrait y avoir ni vainqueur ni vaincu" dans les négociations, selon les termes du ministre français Hervé Gaymard. L'issue du nouveau marathon de Luxembourg dépendra pour beaucoup de la résistance de M. Fischler à l'entente franco-allemande conclue la semaine passée par le président Chirac et le chancelier Gerhard Schroeder. La France est la première bénéficiaire de la PAC actuelle, l'Allemagne apporte la plus grosse contribution à son budget. "Nous avons politiquement décidé d'aider la France", a expliqué M. Schroeder. "En même temps, la France a bougé également", a-t-il souligné. Les deux pays proposent désormais d'instaurer, dans le cadre d'une réforme applicable en 2007, un découplage partiel sur 60% des primes aux céréaliers et 40% de celles à la production bovine mâle. L'évolution est singulière pour Paris, qui refusait il y a encore quelques mois le moindre découplage, mais insuffisante aux yeux des proches de M. Fischler. D'autant que la France a rallié l'Allemagne à son refus de la dégressivité et des baisses de prix des céréales et des produits laitiers. Franz Fischler a appelé vendredi à "prendre un peu de recul par rapport au vieux débat entre découplage total et découplage partiel" des aides, sans encore céder grand chose de son projet global. Un éventuel échec du marathon de Luxembourg ne devrait toutefois pas entraîner le renvoi du dossier PAC au sommet de Salonique. Selon M. Gaymard, le président Chirac et le Premier ministre grec Costas Simitis ont déjà "convenu qu'il y avait bien d'autres sujets à traiter à Salonique et que celui-là, c'était aux ministres de l'Agriculture de le régler". |