La pistache iranienne en sursis sur les tables européennes

L'Iran était en émoi depuis fin avril. La pistache, fierté de la production traditionnelle nationale avec le tapis et le safran, risquait d'être frappée d'interdit par l'UE.\n Selon le chef de la Chambre de commerce de Téhéran, Mohammad Reza Behzadian, cité dans la presse, Bruxelles avait donné 40 jours à l'Iran, premier producteur mondial (45% du marché selon les Iraniens), pour prendre les mesures qui s'imposaient contre les aflatoxines contenues dans ses pistaches.

Sous ce nom se dissimule une substance toxique reconnue comme favorisant les cancers du foie et des reins. Elle est produite par des moisissures se développant sur des céréales ou des arachides conservées dans de mauvaises conditions. Entre le nucléaire, les droits de l'Homme, le commerce, les sujets de discussion ne manquent pas pour les Iraniens et les Européens. La pistache est l'un d'eux de longue date. Les deux parties se sont retrouvées fin mai à Bruxelles.
"L'Iran s'est engagé à diminuer la contamination", a indiqué à l'AFP le chef de la direction des pistaches au ministère de l'Agriculture, Behrouz Qaybi. Selon des sources iraniennes, l'UE a donné à l'Iran six mois pour réduire de 16% l'an dernier à 10% la proportion des chargements de pistaches refoulés aux frontières européennes. Les Européens l'y aideront par leur expertise, d'un bout à l'autre de la chaîne, le conditionnement constituant l'un des handicaps majeurs de l'agroalimentaire iranien.

Selon les mêmes sources, les services sanitaires européens, qui contrôlent aujourd'hui toutes les cargaisons de pistaches iraniennes, pourraient ensuite ne plus procéder qu'à des inspections aléatoires. "L'UE continue à surveiller l'Iran et nous fera connaître ensuite son appréciation de la situation", dit un responsable du Syndicat des exportateurs sous couvert d'anonymat. Les Iraniens savent à quoi ils s'exposent de la part d'Européens qui observent parmi les normes les plus strictes au monde sur l'aflatoxine. En 1997, l'UE avait suspendu les importations iraniennes pendant trois mois après avoir décelé des contaminations 200 fois supérieures à la réglementation.

"Environ 16% des 208.000 tonnes de pistaches produites sont exportées vers l'Union européenne, et sur cette quantité, 16% sont rejetés", dit le chef du Syndicat, Mohammad Hassan Shamsfard. Certes, la part refoulée est revendue dans des pays moins exigeants à moindre prix (500 USD la tonne). Mais, explique Hossein Niku, directeur de la compagnie pistachière Amin Padidar, "quand un chargement est refusé, il faut rembourser, et le client cherche un autre fournisseur". Or la plupart des exportateurs sont privés et n'ont aucune couverture de la part de l'Etat.

L'enjeu n'est pas moindre. Selon le ministère, la pistache a représenté de mars 2003 à mars 2004 803 millions de dollars d'exportations, soit 14,5% des ventes de produits non-pétroliers, supplantant pour la première fois le tapis. Falli Amin, dont la famille exploite les pistachiers depuis des décennies, s'émeut d'être "doublement sanctionnée", par l'UE mais aussi les Etats-Unis, alors que le contrôle de chaque cargaison lui coûte déjà 125 USD. La pistache, comme le tapis, ne tombe pas en effet sous le coup des sanctions commerciales américaines contre l'Iran. Mais ses partenaires américains "prétextent de la législation anti-dumping pour justifier les tarifs élevés qu'ils nous réclament pour importer nos pistaches".

Certains exportateurs vont jusqu'à prêter aux Européens des arrière-pensées politiques. "Un diplomate m'a dit que l'Iran ferait mieux de commencer par s'occuper du problème nucléaire", dit l'un d'eux.


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