"En Australie, tout le monde peut cultiver ces plantes, grâce à notre climat privilégié. Les plus mordus - ils sont 6000 dans ma ville, Sydney - font partie de clubs. Il faut trois ans d'entraînement pour y rentrer, et l'on adopte alors un mode de vie particulier", explique Ian Chalmers, un des 250 juges qui ont établi à Dijon un palmarès des meilleurs spécimens. Cet ingénieur consacre tout son temps libre à ses 5000 orchidées et va deux fois par an à Londres, pour participer à la définition d'une nomenclature internationale. "La variété des orchidées est infinie. Même les plus laides sont intéressantes", dit-il.
En expert, Ian Chalmers a apprécié l'exposition d'orchidées, ainsi que celle de plantes exotiques (appelée "Florissimo") dans un hall voisin, qui se tiennent toutes deux au palais des congrès de Dijon jusqu'au 20 mars. "Je me concentre tellement sur les orchidées que je ne vois pas le reste, habituellement. Ici j'ai profité des décors féeriques", formé par les plantes exotiques, s'exclame-t-il sur fond de bruits de jungle.
Son compatriote Kenneth Siew, également juge, note que ce congrès est l'occasion pour les pays européens de davantage s'organiser: "Un organisme fédéral permettrait comme chez nous d'évaluer de façon unifiée la qualité des orchidées. Ce serait plus fiable".
"On se heurte en France à un certain individualisme", reconnaît Albert Roguenaut, membre de France Orchidées, une association créée spécialement pour l'organisation du congrès. "Elle devrait perdurer et permettre, au-delà des échanges entre passionnés, de mener des travaux scientifiques comme cela se fait en Grande-Bretagne", ajoute-t-il.
En Europe, l'orchidée n'est plus réservée à une élite: "un cattleya par exemple valait l'équivalent de 1.000 euros en 1900. Aujourd'hui on trouve deux ou trois fleurs pour 10 euros dans les jardineries", d'après M. Roguenaut. Mais une fois la fleur passée, la grande majorité des acheteurs se débarrassent de la plante. Il faut de la patience et des moyens, dont une serre, pour les cultiver sous nos latitudes.
Certains passionnés acquièrent des pièces (10.000 euros pour les plus rares) "jusqu'à dépenser leur dernier sou", témoigne Roland Schettler, un conférencier venu de Dortmund, appareil photo en bandoulière. En Allemagne, on dénombre deux sociétés totalisant 4.000 membres, qui partagent leur expérience, organisent des expositions, ont leur revue.
Même dans des pays peu propices à la culture d'orchidées, comme la Hongrie, une société d'orchidophiles s'est crée, rassemblant 300 membres. Zsuzsa Tatrai, venue dans la capitale bourguignonne avec 55 autres Hongrois, en est. Elle s'adonne à sa passion, à raison d'une heure au minimum par jour, depuis un voyage en Malaisie il y a sept ans. C'est de là que vient Seishi Hirayama, pour son entreprise, "Hourai Orchid". Tombé à 6 ans au Japon sous le charme du parfum d'une orchidée de montagne, il a réalisé son rêve: se consacrer entièrement à ces plantes, dans un pays où leur commerce, voire leur "trafic", dit-il, est prospère.
Il table sur de fortes ventes à Dijon afin d'alimenter un fonds pour leur préservation. "Il est possible de satisfaire conservateurs et collectionneurs sans recourir à l'arrachage sauvage et à la contrebande", assure-t-il.