"La France était il y a 20 ans le premier producteur européen d'asperge. Aujourd'hui elle n'occupe plus que le sixième rang, derrière l'Espagne et l'Allemagne qui se disputent la première place, suivis par la Grèce, l'Italie et la Hollande", explique Gilbert Chiron, du Service des nouvelles des marchés (SNM), qui dépend du ministère de l'Agriculture.
L'an dernier, la production française s'est élevée à 18.639 tonnes contre 23.692 en 2002 et 50.000 il y a 10 ans, selon les chiffres du SNM. "Et le déclin devrait se poursuivre, avec une production qui devrait tomber à 12.000 tonnes au cours des prochaines années", prédit M. Chiron. Plusieurs causes expliquent ce recul: la difficulté de trouver des terres sablonneuses propices à ce légume, car en 10 ans la culture de l'asperge épuise voire intoxique le sol, la difficulté à recruter de la main-d'oeuvre pour la récolte et enfin la concurrence de plus en plus pressante, sur le marché du frais, de l'Espagne mais aussi des pays du nord et de l'est de l'Europe.
L'Allemagne, premier pays consommateur européen d'asperges - les Allemands consomment trois fois plus d'asperges que les Français, qui en avalent en moyenne 0,84 kilo chaque année - a développé de manière spectaculaire la culture de ce légume de la famille des liliacées (oignon, poireau, ail) en 20 ans. Ses achats en France se sont élevés l'an dernier à 424 tonnes contre 1.127 tonnes deux ans plus tôt.
Les exportations allemandes vers la Suisse ont également fait du tort aux maraîchers français qui ont vu leurs ventes vers ce pays tomber à 2.900 tonnes l'an dernier contre 4.628 tonnes deux ans plus tôt. "Cette année, la campagne en France ne sera pas fameuse en raison des conditions climatiques, le début du printemps ayant été très frais. Les premières asperges sont arrivées sur les marchés avec trois semaines de retard, c'est-à-dire vers la fin mars. En revanche la production allemande va atteindre son summum cette année", précise M. Chiron. L'asperge est cultivée principalement dans trois régions en France: dans le Sud-Est avec l'an dernier une production de 7.000 tonnes contre 8.888 deux ans plus tôt, suivi par le Sud-Ouest (les Landes) avec 5.673 tonnes en 2004 (7.420 en 2002) et le Val-de-Loire (4.114 tonnes en 2004, soit une production quasi stable sur deux ans).
Quelque 90% des asperges françaises sont blanches ou violettes et 10% vertes. Les blanches et les violettes poussent sous une butte de terre à la température idéale de 11 degrés, tandis que les vertes mûrissent à l'air libre. Comme le textile, les jouets ou les parapluies, les asperges européennes subissent la formidable concurrence de la Chine, premier producteur mondial du légume (83% du marché mondial) qui, avec ses conserves, inonde le monde. "Il n'y a pratiquement plus de conserves françaises d'asperges", déplore M. Chiron.