Alors que Londres estime avoir fait de "gros progrès" sur l'effacement de la dette des pays pauvres et le doublement des budgets d'aide au développement, le dernier volet de son grand plan d'aide à l'Afrique est le dossier commercial.
Londres entend mettre la pression sur le sommet des dirigeants des sept pays les plus riches et de la Russie, réuni en Ecosse du 6 au 8 juillet, pour obtenir une libéralisation du commerce qui, selon elle, permettrait de sortir les pays d'Afrique de la pauvreté. Le Président américain George Bush a accru la pression sur l'Europe en laissant entendre qu'il était prêt à renoncer aux subventions agricoles américaines si l'Union européenne faisait de même, dans un entretien qui devait être diffusé lundi soir par la chaîne de télévision britannique ITV.
"La position du gouvernement américain est que nous sommes décidés à (abandonner nos subventions), et nous le ferons avec nos amis européens", a-t-il déclaré. "Si nous réussissons à libérer totalement le commerce, et si les marchés occidentaux sont ouverts aux pays africains, cela leur réussirait tellement qu'il n'y aurait plus besoin de leur verser des aides", a déclaré M. Bush. "Les bénéfices qui viendraient de l'ouverture des marchés --nos marchés à leurs produits et leurs marchés à nos produits-- seraient bien supérieurs au montant de l'aide" que nous leur versons, a-t-il insisté.
Les Etats-Unis protègent leur marché grâce à des subventions aux produits agricoles, notamment le coton, mais aussi à des normes sanitaires draconiennes et des contraintes administratives faisant frein aux importations. Londres n'espère guère obtenir cette semaine un accord pour ouvrir les marchés des pays riches, mais veut maintenir la pression jusqu'à la conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) à Hong Kong en décembre.
"Le vrai accord interviendra à Hong Kong en décembre et nous devons garder la dynamique qui est enclenchée", a déclaré dimanche Hilary Benn, ministre britannique chargé du Développement international. Cette campagne rejoint opportunément la croisade menée par Tony Blair depuis longtemps pour une réforme drastique de la Politique agricole commune (PAC), dont bénéficie relativement peu la Grande-Bretagne. Il a croisé le fer depuis un mois sur le dossier agricole avec le président français Jacques Chirac, dont le pays bénéficiait de 21% des dépenses de la PAC en 2004.
Les ONG britanniques sont généralement sceptiques face à l'argumentaire selon lequel la libéralisation du commerce sert les intérêts des pays pauvres. "Nous sommes contre le libre-échange et pourtant la Grande-Bretagne le défend. Il peut être préjudiciable à de nombreux pays du tiers-monde", a déclaré une porte-parole d'Action Aid. De même, Christian Aid mène une campagne contre le libre-échange observant que les producteurs ne peuvent rivaliser, à l'étranger et sur leurs propres marchés, avec les produits à bas prix des pays riches et émergents.
D'autres font valoir que la PAC offre aux producteurs des pays du tiers-monde un prix garanti supérieur aux cours mondiaux pour certains produits. Un démantèlement de la PAC servirait davantage les gros producteurs des pays émergents plutôt que les petits producteurs des pays pauvres. Et il servirait également les intérêts britanniques. "La Grande-Bretagne elle-même, qui n'a pas d'agriculture très développée, a une indutrie agro-alimentaire qui bénéficierait de pouvoir importer des matières premières agricoles au cours le plus bas possible", note un expert agricole.