Installé depuis 1981 sur le plateau caillouteux des Costières, dont les 30.000 ha constituent l'une des plus vastes zones arboricoles d'Europe, cet agriculteur de 48 ans reconnaît qu'il ne "tiendrait pas deux jours" sans la manne providentielle du fleuve, situé seulement à deux kilomètres de son exploitation.
Le précieux liquide est fourni par une station de pompage de la compagnie nationale d'aménagement du Bas-Rhône et du Languedoc (BRL), société d'économie mixte dont le capital est détenu par les collectivités locales de la région. "Cette eau nous revient cher mais au moins on est sûr de ne jamais en manquer.
Notre terroir a beau être excellent pour le fruit, on n'y trouverait pas une goutte d'eau actuellement, même si on forait à plusieurs centaines de mètres de profondeur", affirme à l'AFP l'agriculteur gardois, à la tête d'une quarantaine d'hectares de verger. Cet approvisionnement, qui lui garantit à tout moment un débit et une pression d'eau, ampute toutefois d'environ 20.000 euros le chiffre d'affaires annuel de 900.000 euros que lui rapporte sa production fruitière d'un millier de tonnes.
Et le prix, 8 centimes d'euro le m 3, gagne entre 2 et 3% chaque année. Outre les frais liés à la purification de l'eau, qui lui parvient chargée de terre et de coquillages, l'arboriculteur s'acquitte d'un abonnement fixe auprès de BRL, à payer même si des précipitations abondantes rendait inutile le pompage. "La solution consiste donc à économiser l'eau au maximum", explique Jean-Paul Arcé, qui a adopté un système de micro-asperseurs dans son verger, dont il contrôle régulièrement, parcelle par parcelle, le degré d'humidité à l'aide d'un tensiomètre.
"Ces micro-asperseurs, qui nous ont fait diminuer de 30% notre consommation d'eau, nous permettent de la localiser efficacement au pied de l'arbre. D'ailleurs, si on en versait trop, elle descendrait directement dans le sol", souligne-t-il. La société BRL, qui gère également une douzaine de barrages et sécurise l'alimentation en eau potable des grandes agglomérations, équipe l'irrigation de plus de 130.000 hectares en Languedoc-Roussillon.
Elle y alimente 1.600 agriculteurs dans la zone rhodanienne du Gard. "BRL est l'arme anti-sécheresse par excellence et une assurance absolue pour les agriculteurs", note Claude Allet, président du directoire, d'autant que seuls les abonnés à la compagnie sont épargnés par l'arrêté préfectoral qui restreint l'usage agricole de l'eau durant le jour dans le département. Le stock d'eau que représente le Rhône ne risque en effet guère d'être menacé et la compagnie n'a d'ailleurs guère besoin d'y puiser plus de 100 millions de m3, sur une réserve potentielle de quelques 2 milliards.