La sécheresse déclenche la guerre de l'eau à Murcie

Aux abords de la ville de Cieza, située au milieu d'un désert percé par le fleuve Segura, le gendarme de l'eau local qu'est la Confédération hydrographique du Segura (CHS) est venue à plusieurs reprises vérifier le compteur d'un moteur à impulsion qu'elle soupçonne de tirer du fleuve plus d'eau que de droit. En vain, les agriculteurs l'en ayant toujours empêché.

Cieza, une ville de 40.000 habitants, détient l'immense privilège de se trouver au départ du gigantesque système d'irrigation de la région de Murcie, au nord, dans la Vega Alta, la haute plaine du Segura. Mais elle en abuse, selon le commissaire des eaux de la CHS, Manuel Aldeguer, qui parle d'"irrégularités très graves" et de vol d'eau "à grande échelle", d'où les tentatives d'inspecter le moteur de la Acequia del Horno.

Dans le contexte de sécheresse, la première à se plaindre est la région voisine de Castille-La Manche qui fournit au nom du principe de solidarité un précieux volume de l'eau de son fleuve, le Tage, à la région de Murcie. Puis viennent les agriculteurs qui vivent en contrebas et disent manquer d'eau. Quatre sortes d'eau se mélangent à Cieza dans le lit du Segura, celle du fleuve lui-même, celle du Tage issue d'un transvasement géant et qui sera déviée dans deux canaux plus au sud, l'eau potable qui sera dirigée plus bas vers une station de pompage, et le débit écologique nécessaire à la survie du fleuve.

Tant d'eau que les terrains irrigués se sont multipliés ces dernière années, au moins 800 hectares à Cieza, estiment les écologistes d'Ecologistas en Accion, alors qu'il est interdit d'augmenter la surface irriguée depuis 1986 dans la région. Autour de la ville, des zones semi-désertiques sont aujourd'hui plantées d'arbres fruitiers verts ou de laitues encore jeunes, facilement repérables.

Le plus grave, dénonce Ecologistas en Accion, c'est que dans ce désert entouré de montagnes rocheuses, sept agglomérations dont cinq avec terrains de golf, principalement à destination de touristes allemands, britanniques et néerlandais, sont en projet, sans que l'on sache avec quelle eau ils seront arrosés. Selon Ruben Vives, de cette association, les sociétés immobilières de la région achètent des terres, y font venir de l'eau pour irriguer puis les urbanisent, "utilisant l'eau à des fins spéculatives".

"Comment demander de l'eau par solidarité aux autres régions d'Espagne quand on ne montre pas l'exemple chez nous?", interroge-t-il, notamment en référence à la Castille-La Manche dont le président, José Maria Barreda, a prévu "une guerre longue". La soif du gouvernement de Murcie est telle qu'il prône même un transvasement des eaux du Rhône. Dans son bureau de Murcie, M. Aldeguer a sous les yeux une feuille avec la consommation d'eau autorisée de villages de la Vega Alta, et en face, le volume d'eau réellement utilisé déduit de la consommation d'électricité des moteurs.

Le rapport est de deux, voire trois fois supérieur. Le différentiel depuis le 1er octobre 1995 serait de 4 millions de m3. Du coup, la CHS a décidé de sceller 70 puits qui ont déjà consommé ce à quoi ils étaient autorisés pour l'année hydraulique se terminant le 30 septembre. Elle ouvrira également des procédures de sanction à l'encontre des fraudeurs. C'est que la sécheresse est grave. "L'ensemble des retenues d'eau ne totalisent plus qu'environ 69 millions de m3, dont 40 d'eau morte", impossible à pomper. Il y en avait 172 l'an dernier.

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