M. Douste-Blazy "a marqué la préoccupation française après la présentation par la Commission d'offres concernant en particulier l'accès au marché agricole de l'Union européenne, sans concertation préalable avec les Etats membres", a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Jean-Baptiste Mattéi. Dans un entretien téléphonique mercredi avec M. Straw, le ministre français "a insisté auprès de la présidence britannique pour que le Conseil Affaires Générales et Relations Extérieures (qui regroupe les représentants des pays membres de l'UE, ndlr) joue pleinement son rôle de contrôle politique de la négociation", a souligné M. Mattéi.
Paris souhaite que le Conseil puisse "veiller au respect par la Commission de son mandat", a-t-il poursuivi. M. Douste-Blazy avait rejeté mardi les propositions américaines pour relancer les négociations sur l'agriculture à l'OMC, les jugeant "irréalistes". Il avait alors sévèrement rappelé à l'ordre le commissaire européen au Commerce, le Britannique Peter Mandelson, qui a proposé de fortes baisses des subventions de l'UE, lui demandant de conformer aux "principes qui s'imposent au négociateur européen".
M. Mandelson est un proche du Premier ministre britannique Tony Blair dont le pays s'oppose traditionnellement à la France au sein de l'UE sur la question de la Politique agricole commune (PAC). Lundi, le représentant américain pour le Commerce Rob Portman avait annoncé à Zurich que les Etats-Unis étaient prêts à accepter une baisse de 60% sur cinq ans des aides internes qui faussent le plus les échanges mondiaux, en échange d'une baisse de 80% des aides internes européennes. En réponse, M. Mandelson avait mis immédiatement sur la table une baisse de 70% des aides versées par Bruxelles.
S'exprimant mercredi en marge des discussions de l'OMC à Genève, la ministre française du Commerce extérieur Christine Lagarde a également mis en cause M. Mandelson. "Il semble que le commissaire Mandelson, dans sa dernière proposition qui concerne notamment les produits sensibles, est allé à la limite ou au-delà de ce qui avait été fixé par une ligne rouge par 13 Etats membres", a-t-elle déclaré.
Vendredi dernier, 13 pays de l'UE - dont la France, l'Espagne et l'Italie - avaient adressé un rappel à l'ordre à Bruxelles en délimitant les "lignes rouges" à ne pas franchir dans les négociations sur l'agriculture. Les subventions agricoles sont au coeur des négociations sur la libéralisation du commerce mondial, connues sous le nom de cycle de Doha. Elles doivent être concrétisées dans deux mois à Hong Kong lors d'une conférence des ministres des 148 pays membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). L'accord de Luxembourg de juin 2003 entre les ministres de l'Agriculture de l'UE a entériné la sanctuarisation jusqu'en 2013 du montant de la majeure partie des dépenses de la PAC et la France réclame le respect de cet accord.