"Ce que demande le président de la République, c'est que la négociation se poursuive en transparence et en négociation étroite entre la Commission et les Etats membres, et qu'il y ait une réorientation de la négociation pour revenir à l'esprit du cycle de Doha et aboutir en 2006 à un accord équilibré et acceptable par la France", a affirmé l'Elysée.
Le quotidien Le Monde a révélé, dans son édition datée de vendredi, l'existence de cette lettre, dans laquelle M. Chirac met en garde la Commission contre de trop grandes concessions sur le volet agricole. L'Elysée a refusé d'en dévoiler le contenu, déclarant qu'il s'agissait d'une "lettre personnelle à M. Barroso et non d'une démarche officielle".
Les subventions agricoles sont au coeur des négociations sur la libéralisation du commerce mondial, connues sous le nom de cycle de Doha. Elles doivent être concrétisées dans deux mois à Hong Kong, lors d'une conférence des ministres des 148 pays membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Paris estime que la Commission est en train de passer un "marché de dupes" en faisant des concessions excessives et unilatérales aussi bien vis-à-vis des Etats-Unis que des grands pays émergents.
La France a ainsi demandé jeudi au ministre britannique des Affaires étrangères Jack Straw de convoquer la semaine prochaine une réunion des 25 pour débattre de la négociation commerciale en cours à l'OMC, selon des sources diplomatiques à Bruxelles. La lettre de M. Chirac, qui "reprend l'ensemble de notre position sur l'OMC" selon l'Elysée, "rappelle qu'on voulait un cycle du développement, c'est-à-dire d'abord consacré aux besoins des pays en développement". "Or on constate un resserrement progressif autour de la seule question agricole, très en deçà des ambitions initiales et ne répondant pas aux besoins des pays les plus pauvres", ajoute-t-on.
Lundi, le représentant américain pour le Commerce, Rob Portman, avait annoncé à Zurich que les Etats-Unis étaient prêts à accepter une baisse de 60% sur cinq ans des aides internes qui faussent le plus les échanges mondiaux, en échange d'une baisse de 80% des aides internes européennes. En réponse, le commissaire européen au Commerce Peter Mandelson avait mis immédiatement sur la table une baisse de 70% des aides versées par Bruxelles. Paris se dit prêt à éliminer progressivement les aides, mais à la condition que les crédits à l'exportation, l'aide alimentaire et le commerce d'Etat soient également démantelés. Jacques Chirac demande aussi que les concessions en matière agricole "soient équilibréees par des ouvertures équivalentes, en particulier sur l'industrie et les services", a déclaré l'Elysée qui a souligné que les pays les plus pauvres devaient aussi avoir "un traitement particulier", notamment sur le coton.