Une fois devenu facilement transmissible d'homme à homme et l'épidémie commencée, le virus devrait continuer à "s'adapter au fur et à mesure" en passant d'un malade à l'autre, et "donc varier assez vite", explique Sylvie van der Werf (Institut Pasteur, Paris). Il faut donc, souligne-t-elle, préparer un vaccin efficace contre un virus en mutation génétique constante. D'autant plus, ajoute-t-elle, qu'entre l'identification du virus pandémique et la commercialisation des premières doses de vaccin, il risque de s'écouler "six mois", si un moyen d'accélérer la procédure n'est pas trouvé.
Autre défi : produits actuellement sur des oeufs embryonnés, les vaccins contre la grippe saisonnière permettent chaque année de protéger quelque 300 millions de personnes, soit seulement 5% de la population mondiale. "On manque de capacité de fabrication de vaccins pour 1,2 milliard de personnes à risque" en cas de pandémie, a résumé le docteur Suryaprakash Sambhara (CDC, Centre de contrôle des maladies, Atlanta, Etats Unis), car il faudrait "4 milliards d'oeufs embryonnés" pour les produire. D'où la nécessité de mettre au point "une alternative viable aux vaccins produits sur des oeufs", a-t-il souligné.
Le nouveau prototype de vaccin par génie génétique fabriqué par son équipe s'est avéré capable de protéger des souris contre différentes souches de virus H5N1 de la grippe aviaire isolées chez des malades, selon des travaux publiés en février dans la revue médicale britannique The Lancet. Une première phase d'essai sur l'homme de ce vaccin est en cours. Partant d'une partie stable commune à différentes souches de virus H5N1 pour susciter une réponse immunitaire, il pourrait, selon le Dr Sambhara, protéger aussi contre un éventuel virus pandémique. D'autres "petits pas" sur la voie d'un vaccin sont faits par d'autres équipes, résume une spécialiste. Plus de trente prototypes sont en cours de développement, selon un bilan dressé en mai par la Fédération internationale de l'industrie du médicament. Un prototype développé par le laboratoire Sanofi-Pasteur s'est avéré protecteur, mais seulement à dose massive. Or, le manque de capacité de production des vaccins anti-grippe implique de trouver des procédés efficaces à faible dose. Il faut aussi tenter de susciter plusieurs formes de réponses immunitaires (anticorps, certains globules blancs), y compris au niveau des muqueuses (nasales notamment) pour faire barrière au virus, précise le Pr van der Werf. Tout dépend aussi, dit-elle, de quel niveau de protection nous voulons, en cas de pandémie: "protéger contre la mortalité, contre la maladie grave ou la maladie tout court".
La mise au point de procédés de diagnostic rapide s'avère aussi nécessaire, a souligné le Dr Herman Kosasih (Unité de recherche médicale navale, Djakarta), relevant que dans les premières 48 heures de la maladie, "les infections H5N1 sont souvent impossibles à distinguer de la grippe humaine ou de la dengue". Or pour être efficaces, les antiviraux doivent être administrés très tôt. La recherche se poursuit aussi pour mettre au point de nouveaux médicaments, susceptibles d'agir au niveau de la membrane cellulaire (en entravant les processus de bourgeonnement ou de fusion) pour empêcher les virus d'entrer dans une cellule ou d'en sortir après s'y être multipliés.