La Belgique a ainsi connu le mois de juillet le plus chaud de son histoire, selon l'observatoire royal météorologique, alors qu'elle n'a compté que 8 jours de pluie contre 17 habituellement. Avec plus de 30°C en moyenne, la Pologne assure elle aussi avoir battu des records pluriséculaires pour un mois juillet, le plus chaud depuis 227 ans. A Londres, il faut remonter aux étés 1933 et 1934 pour retrouver un thermomètre aussi débridé. Des excès de mercure qui ont prématurément jauni les parcs et jardins anglais, amenant la reine Elizabeth II à déplorer l'état des pelouses de Buckingham Palace... Plusieurs compagnies ont été autorisées à rationner leurs clients, mais la polémique enfle parallèlement sur l'ampleur des fuites dans le réseau, privatisé en 1989: la principale société à desservir Londres, Thames Water, perd à elle seule 915 millions de litres d'eau par jour, l'équivalent de 366 piscines olympiques.
Aux Pays-Bas, le niveau des nappes phréatiques est en-dessous de la normale et les digues menacent de se fissurer en raison de la sécheresse. A ce stade cependant, seul le sud de l'Espagne, dans les régions de Murcie et d'Alicante, pourrait connaître des ruptures d'approvisionnement en eau potable: les réservoirs d'eau du bassin du Tage ne sont plus qu'à 10,7% de leur capacité, selon les autorités. En Andalousie, la province de Malaga fait surveiller par le satellite Ikonos la qualité de l'eau servant à remplir les piscines ou à arroser les golfs, afin de garder l'eau potable au seul bénéfice de la consommation humaine. La ministre espagnole de l'Environnement, Cristina Narbona, en vient à évoquer des mesures d'urgence comme l'ouverture accélérée d'une usine de dessalement et le forage de nouveaux puits.
D'ores et déjà, l'agriculture fait ses comptes: dans le sud de l'Autriche, en Carinthie, la production de maïs a été anéantie en certains endroits et celle du fourrage sera déficitaire de 35% en moyenne. En Italie du nord, le premier syndicat d'agriculteurs, Coldiretti, évoque des pertes de près de 500 M d'euros sur les céréales, le maïs, le riz et le soja. Trois ans après une sécheresse record en 2003, la région souffre à nouveau d'un manque d'eau catastrophique autour de Turin, Milan, Trieste et Venise. L'état de "catastrophe naturelle" a été décrété autour du Pô, qui stagne par endroits à plus de 7 m sous son niveau normal. Le nord de l'Italie s'interroge sur l'absence de réservoirs permettant de stocker l'eau, comme dans le sud du pays, rompu aux sécheresses estivales et équipé depuis longtemps.
La Belgique prévoit une baisse de 10 à 20% des rendements céréaliers et la Lituanie, qui a décrété sept régions sinistrées, jusqu'à 22%. La Pologne a débloqué 500 M de zlotys (125 M EUR) sur deux ans en faveur des agriculteurs qui pourront subir près d'un tiers de pertes de récoltes. Selon Michel Kowaleski, de l'Institut météorologique de Varsovie, "la taille des fruits est déjà réduite de moitié à cause de la sécheresse". De même, la chambre d'agriculture de Rhénanie-Westphalie a prévenu que les frites seront "plus courtes" cette année, car les pommes de terre sont plus petites. Mais surtout, la production allemande de fourrage a chuté de 50%, voire 100%, par endroit. La situation a conduit la Commission européenne à autoriser dès fin juillet l'utilisation des terres en jachère - normalement prévue à partir du 31 août - pour l'alimentation des animaux dans 9 Etats membres (Autriche, France, Belgique, Finlande, Luxembourg et Italie, ainsi que partiellement en Allemagne, Espagne et Suède). Les précédentes sécheresses depuis 2003 avaient déjà coûté 12 milliards à l'UE, selon la Commission.
