En dépit de certaines réserves, les principaux pays producteurs, l'Italie et l'Espagne, ainsi que le Portugal et la Grèce, ont jugé l'approche de la Commission européenne "globalement positive", a indiqué une source diplomatique. Seule la France s'y est opposée. Après avoir présenté son projet de réforme la semaine dernière au Parlement européen et à la presse, la commissaire à l'Agriculture Mariann Fischer Boel l'a expliqué aux ministres de l'Agriculture des 27, qui tenaient lundi leur premier conseil de l'année à Bruxelles, sous la nouvelle présidence allemande de l'UE. Principale mesure de la réforme, Bruxelles veut "découpler" les aides aux quelque 1,4 million de producteurs de l'UE: celles-ci seront versées sur des bases forfaitaires, et non plus en fonction des volumes produits, laissant aux agriculteurs le choix de s'orienter vers les productions qu'ils jugent les plus porteuses.
Bruxelles veut aussi renforcer les organisations de producteurs face aux grands groupes de distribution pour qu'ils négocient mieux les prix; introduire des mécanismes de gestion de crise; et encourager les Européens à manger davantage de fruits et légumes par des campagnes de promotion. Au total, le budget agricole communautaire dévolu à ce secteur représente 1,5 milliard d'euros et devrait rester inchangé avec la réforme. L'Italie s'est inquiétée de plusieurs aspects de la réforme, comme des risques de distorsions de concurrence entre agriculteurs avec le nouveau système de subventions, et elle a jugé les mesures de gestion de crise proposées insuffisantes. Avec l'Espagne et plusieurs autres pays, elle s'est aussi inquiétée d'une baisse des tarifs douaniers pour les importations, sans contrepartie. La France s'est montrée plus radicale, critiquant un "manque d'ambition", en particulier sur la gestion des crises, et estimant le projet "pas satisfaisant" dans son ensemble. Dans plusieurs dossiers européens, la tenue prochaine de l'élection présidentielle pèse sur l'attitude du gouvernement français et des principaux candidats, soucieux de ne pas s'aliénier le vote rural. La prochaine discussion des ministres sur cette réforme doit avoir lieu en avril. La Commission espère que la réforme sera adoptée en juin.